Voilà pourquoi monsieur Dickson était à Montréal.
Voilà pourquoi, il était allé la rencontrer dans un café. Elle savait que sa maison était surveillé par la police.
On n'avait oublié aucune possibilité. Comme le fait que l'agresseur aient des raisons de s'en prendre à eux. Que ce n'était pas seulement un pervers chaotique mais qu'il voulait se venger.
Le mari de l'épouse ayant fait un certain nombre de victimes dans sa carrière et son combat pour devenir riche.
Il avait été cruel et impitoyable mais avait gagné.
Qui se soucie des perdants.
Il y en a tant. Et on devrait se soucier de ceux qu'on écrase qui ne font pas seulement du jus ou du pus lorsqu'on presse sur leur petit corps à la façon des enfants qui éfouèrent un grillon. Qui se liquéfie aussitôt sans effort.
Il était donc possible qu'on n'ait pas affaire à un maniaque - possibilité 3 ou 4 - mais à un ancien adversaire. Ou même un ancien amployé ou ex-associé devenu inutile et inutilisable et qui voulait se venger. Il avait dû se séparer de bien des gens qui l'auraient encombré dans l'étape suivante de sa carrière.
Employé ou associé utile à l'étape précédente. Mais devenu un poids mort. Une carcasse vide de tout enthousiasme. Un citron pressé.
Il leur avait souhaité bonne chance dans leur nouvelle carrière. Était enthousiaste devant les nouveaux défis qu'ils auraient à affronter. Il leur disait qu'il leur offrait cette opportunité providentielle d'utiliser leurs talents à leur plein potentiel alors qu'ici, là où ils étaient, leur emploi devenait routinier.
Il avait déjà dit de telles choses avec conviction. Maintenant c'était le rôle du directeur responsable du personnel.
La plupart des gens sont résignés depuis l'enfance. On se transmet la résignation de parents à enfants.
Il ne faut pas viser trop haut sinon on sera inévitablement déçu. Donc, on ne visait pas trop haut et on était déçu. On se contentait de gagner sa vie. Et celle de sa femme. Et des enfants de sa femme. Et parfois, on n'y parvenait même pas. Ou, il était arrivé qu'on y soit parvenu avec persévérance et amour du travail et du devoir. Mais notre poste budgétaire n'entrait plus dans sa petite case habituelle. L'entreprise avait d'autres projets dont on ne faisait pas parti.
On vous escortait alors avec vos boites jusqu'à la porte. Pour vous éviter de revenir et de démontrer votre mécontentement. Et de démotiver vos collègues en leur faisait voir ce qui vous arrivait après 30 ans de bons et loyaux services. Eux qui n'étaient là que depuis 10 ans.
Mais vous n'aviez envie de rien démontrer. Vous étiez résigné. Mais il se pouvait que vous ne le soyez pas suffisamment. D'où l'utilité des gardes de sécurité. Et des boites de carton. Étonnamment, tout ce que vous possédiez dans cette entreprise, tout ce que vous aviez accumulé depuis 3 décennies tenait dans une seule boite.
Et la vie étant bien faite. De tous ces gens tombés dans les poubelles de l'histoire de l'enreprise, aucun n'était revenu sous forme de fantômes hanter les lieux. Ou avec un fusil.
C'était arrivé.
Ailleurs.
Mais pas ici.
Jusqu'à présent.
La police avait fait remarqué que ce pouvait être le cas.
Et après sa fille, il s'en prendrait à sa femme. Comme tous les lâches, il n'oserait pas s'en prendre à lui. D'où l'usage de la police. Une voiture de l'autre côté de la rue pour bien visualiser la maison et le terrain. Et un agent dans la maison.
Le téléphone était sur écoute. Bien sûr.
Elle avait donc utilisé une cabine téléphonique au lieu de son portable.
iphoe 5 S. 16 GO. 800 $.
L'évolution en marche.
Afin qu'aucun numéro ne reste dans une mémoire électronique quelconque.
Il y a des gens qui font des sudokus, du scrabble, des mots croisés ou participent à des pools de hockey pour se désennuyer. Je bois mon thé et je fais un quart d'heure de géopolitique. Et, en attendant la prochaine guerre mondiale - aujourd'hui, mardi 3 février 2015, il n'y a pas encore de guerre mondiale - j'écris des histoires de fantômes.
HISTOIRES DE FANTÔMES
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Vers minuit, à la lueur de la chandelle, monsieur Henry Dickson, devant l'âtre où brûle des bûches d'érables et de vieux parchemins, se penche sur son écritoire. Tout est tranquille dans la grande maison, tout semble dormir et, soudain,
il y a ce bruit.
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