HISTOIRES DE FANTÔMES

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HISTOIRES DE FANTÔMES.

Vers minuit, à la lueur de la chandelle, monsieur Henry Dickson, devant l'âtre où brûle des bûches d'érables et de vieux parchemins, se penche sur son écritoire. Tout est tranquille dans la grande maison, tout semble dormir et, soudain,
il y a ce bruit.

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26.10.13

404.100.8

La bande dessinée était alors un art nouveau en Amérique et en Europe malgré que le grand écrivain Johann Wolfgang von Goethe appréciait la verve de Rodolphe Töpffer. Ce n'est donc pas un art mineur.

Monsieur Kafka raconta l'anecdote de la joie du grand auteur que les dessins amusants et inventifs du pédagogue avait rempli d'admiration. Lui qui était pourtant un écrivain si sérieux.

Comme monsieur Hitler avait essayé en vain de vendre ses petits tableaux ou de les confier à une galerie d'art, il n'allait pas contredire ce que disait Kafka.

Un problème parmi d'autres en cette époque où tout était à découvrir. Comment le narrateur ou le scénariste allait-il conter son histoire au dessinateur afin que celui-ci comprennent ce qui était attendu de lui. Considérant que l'absence de clarté et la confusion ne pouvait qu'amener des catastrophes.

Monsieur Kafka essaya plusieurs méthodes qui préfiguraient celles qui sont devenus communes de nos jours.

Il y avait le classique style de la pièce de théâtre. Le nom du personnage qui s'exprime au centre de la page. Tout ceci était élégant et réclamait la machine dactylographique que la secrétaire revenue de sa bouderie - comme les femmes son inconstantes - lui apprenait à toucher. Car, jusqu'à présent, il se contentait d'un encrier de verre et d'une plume d'oie taillée en pointe pour sa poésie. Lui-aussi comme tant d'autres devrait s'astreindre à accepter le progrès et ses machines. 

Donc, ce sera comme une pièce de théâtre avec les didascalies. Explication scénique, disposition et jeu des acteurs.

_ Tout ceci est beau

Dit monsieur Kafka en admirant sa première page qu'il venait de terminer. Il avait mal aux doigts. Écrire à la machine n'est pas un travail aussi féminin que l'on pense. Il faut des doigts robustes.

Il essaya aussi ce qui allait devenir le scénario à la Allen Moore. Ce que lui-même appelle artist proof. À l'épreuve des artistes. Le pire d'entre eux ne pourra faire d'erreur s'il suit ses minutieuses instructions. Chaque case ou petite boite pour le dessin étant expliquée et commentée sous la forme d'une longue nouvelle.

Comme il avait mal aux doigts, il allait au plus simple. Ce qui allait devenir la narration à la Stan Lee ou Marvel, son éditeur. Le scénariste raconte, sans écrire quoique soit, ou téléphone, ses idées. Par exemple, un dieu mauvais arrive vers la Terre ce qui déclenche des volcans. Et un dessinateur particulièrement doué comme Jack Kirby, qui aime dessiner les volcans, brodera pendant les 22 pages standardisées ce qu'il imaginera. Il remettra ensuite ses pages et Stan Lee, écrira le texte des dialogues directement sur les dessins. 

Un moyen terme se trouve dans les scénarios sur 3 colonnes de Greg. Il y a les indications de la case et de sa place dans la page. Quels personnages sont présent dans quel lieu à quelle heure. Et on finit par les noms des personnages qui parlent. Et on recommence pour le dessin suivant.

À ce moment, il inventa à lui tout seul ce qu'on découvrira péniblement des générations plus tard, car, malheureusement, comme on le découvrira bientôt, des événements gravissimes l'éloigneront de cet art pour revenir à la poésie d'inspiration grecque et latine.

Ayant trouvé la fin de l'histoire et son début. Tenant compte du nombre de pages que lui avait spécifiée sont éditeur, il divisa l'histoire par petit bout pour chacune de ces pages. Et dans chacune, divisa l'idée principale selon le nombre de cases ou de petits tableaux disponibles.

Monsieur Hitler remarqua que ses dialogues étaient longs ce qui ne lui laissait pas assez de place pour respirer. 

Monsieur Kafka se demanda s'il ne préférerait pas une bande dessinée muette.

Pour avoir la paix avec la secrétaire qui disposait des lieux en l'absence de son patron - absence qui devenait de plus en plus singulière ou quasiment étrange - il la fit poser.Habillée, bien sûr. Il n'aborda pas les séances de dessins avec modèle nu qui l'aurait profondément choquée. Elle avait entendu tant de choses sur les moeurs dissolues des artistes mais n'aurait jamais imaginé qu'ils aillent jusqu'à dessiner des femmes nues et que des femmes honorables se dévêtent devant des hommes. D'abord comme victime (elle protesta) (protesta davantage quand il la fit coucher sur le sol ce qui était inconvenant pour une jeune femme). Ensuite, il la fit asseoir à son bureau. Diplomatiquement, monsieur Hitler pensa que son héros pouvait avec une assistante secrétaire ce qui lui éviterait de parler tout seul. Leur relation serait uniquement professionnelle et platonique. 

Monsieur Hitler avait terminé de dessiner au plomb la première image, il la fit admirer par tous. Lui-même était particulièrement fier de son travail. Il allait la mettre à l'encre, ce qu'on appelle encrer, lorsqu'on cogna à la porte du bureau. 

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État 1é 25 oct. 2013