HISTOIRES DE FANTÔMES

__________________________________________________________________________________________________

HISTOIRES DE FANTÔMES.

Vers minuit, à la lueur de la chandelle, monsieur Henry Dickson, devant l'âtre où brûle des bûches d'érables et de vieux parchemins, se penche sur son écritoire. Tout est tranquille dans la grande maison, tout semble dormir et, soudain,
il y a ce bruit.

___________________________________________________________________________________________________

9.10.13

369.65

Les pires craintes des parents venaient de se matérialiser.

Quelque chose

On avait fini par tant espérer.

Quelque chose.

Il fallait

Il aurait fallu

Quelque chose qui permettrait d’aller plus loin. D’avancer. Et jamais cet indice ne se présentait.

C’aurait pu être un élément matériel ou, mieux, vraiment mieux: un témoin.

Enfin, un témoin qui se serait souvenu soudainement de quelque chose et qui aurait eu des remords de ne pas s’être... Non pas dénoncé (ce terme étant, disons, malgré sa précision) ou signalé avant.

Voilà.

Signalé.

Mais

Pourquoi ne l'avait-il pas fait avant?

Tant de questions venaient à l'esprit.

Et il ne faut pas penser que le témoin dont on parle, qu'on imagine, ne le les posait pas.

Plus le temps passait, plus il devenait délicat - à défaut d'autre mot - de se pointer dans la paysage. On hésite. Cette hésitation vous tenaille. On devrait. Mais on est lâche, peureux, paresseux.

Parce que

Parce qu'il ne voulait pas s'en mêler. Se compliquer la vie.

Parce que

Si vous êtes à proximité de la violence, même par hasard, une partie de cette violence peut vous atteindre. Vous éclabousser.

Un homme mauvais peut se venger.

Et tout indiquait la présence du Mal. Signalait l'existence d'un homme (probablement) mauvais.

Si vous l'aviez entreaperçu, il pouvait aussi vous avoir deviné. Se souvenir de vous. Vous atteindre où que vous soyez. Votre famille avec vous.

Il pouvait

Il pouvait tant

Et vous, si peu

Mais il n'y avait pas que ça.

C'était plus compliqué.

Plus le temps passait, plus tout se compliquait.

Et si le pire arrive

Cette idée s'insinuait parmi les conséquences.

Oui. Oui, si le pire arrive, vous en porterez une partie des responabilités. Il se peut qu'on vous en veuille. Ce qui complique encore la recette du débat moral qui se brasse dans votre cerveau.

Mais il n'y avait pas eu de témoin.

Si on veut être plus précis. ll y en avait eu. Il y a toujours des témoins. On ne peut rien faire dans une ville où il y a tant de gens sans que quelqu'un ne soit là. Quelque part. Au même moment. Au même endroit. Et soit bien placé, géographiquement, temporellement, pour voir.

Parfois, sans être vu.

Donc

Donc quelqu'un avait vu.

C'était inévitable.

Et pour toutes les raisons simples ou complexes que l'on vient d'aligner, il avait préféré rester en dehors de cette afffaire qui ne le concernait pas.

Ou s'il y en avait eu,

Et on vient de dire qu'il y en avait eu, il, elle, eux, continuait à peser le pour et le contre quelque part en consultant se montre et son calendrier. Et son ulcère d'estomac.

Plus le temps passant plus les souvenirs soudains devenaient malgré eux louches.

Heureusement, il y a l'oubli.

Heureusement, on se souvient de moins en moins.

Les policiers après avoir espéré un témoin. Aidé par le mari de l'amie de monsieur Dickson qui faisait publier des annonces et des récompenses. Les policiers espéraient un suspect.

Un nouveau suspect qui aurait dit ou fait quelque chose de stupide.

Ou un complice ou un jaloux ou un ennemi du suspect ou quelqu'un qui aurait été déçu par lui et qui l’aurait dénoncé mais rien. Rien.

Toutes ces choses auraient été possibles.

Et cette fois, l’indice indispensable était là.

Et c’était le corps de la fillette.