HISTOIRES DE FANTÔMES

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HISTOIRES DE FANTÔMES.

Vers minuit, à la lueur de la chandelle, monsieur Henry Dickson, devant l'âtre où brûle des bûches d'érables et de vieux parchemins, se penche sur son écritoire. Tout est tranquille dans la grande maison, tout semble dormir et, soudain,
il y a ce bruit.

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2.6.14

478.175. ON EST SI PEU DE CHOSE. MAIS ON PEUT ÊTRE ENCORE MOINS. DIMINUER SANS CESSE.

Jeudi 15 mai 2014. 1. 10 heure de la nuit.

Sous-sol

Cave

Fosse

Odeur de fumier, de pisse, de purin

Pourriture

Odeur

Il y avait un coin bricolage où il y avait quelques outils - le minimum nécessaire à l'entretien d'une maison - et de ces quelques outils, certains étaient encore tachés de sang.

Signe qu'ils avaient servi à autre chose

On n'avait pas jugé bon de les nettoyer

Signe.

Que jamais personne ne venait ici. Que l'homme ne s'attendait pas à ce qu'on descende ici. Il n'y avait eu, jusqu'à présent, que lui et ses partenaires de jeu. Ses outils. Et accessoires. Qu'il avait réduit en pièces détachées. Et qui, si la plupart se mouvait encore il y a peu. Et quelques unes sortaient d'elles quelques gémissements ou une forte respiration ou un râle. Ces outils vivants ne n'étaient plus.

Il y avait l'odeur.

L'officier déchiré en 2. Ici et là.

Le policier marathonien égorgé.

Du coffre à outil, monsieur Henry Dickson sortit quelques rondelles de métal utilisables avec des boulons et des écrous.

Comme ceux qu'il avait vissé dans les os de quelques femmes afin de pouvoir les manoeuvrer plus facilement. 

Il n'aurait pu à devoir compter sur leur collaboration, leur bonne volonté, leur peur, leur force physique. Le désir de vivre. L'espoir qu'après avoir tant supporté, on aurait pitié. Elles promettraient d'oublier, de pardonner. Elles s'excuseraient.

Sans doute, les femmes l'avaient-elle fait souffrir dans sa vie ?

Probablement qu'il avait ses raisons.

On ne scie pas les os des bras ou des jambes d'une femme pour rien.

On ne coupe pas ses doigts. Un par jour. Sans une très bonne raison.

Il y avait des boulons vissés dans les os avec des anneaux. De grands anneaux. Sur les anneaux on installait des crochets de métal reliés à des chaînes étirées vers des poulies et un treuil. 

On pouvait les installer et les monter au plafond. Les faire voler délicatement. 

Monsieur Dickson trouva ce qu'il voulait.

Le panneau central de contrôle de l'électricité. L'entrée principale. Ancien modèle. 

Des fusibles de verre avec des capuchons de couleurs contrôlaient les circuits secondaires menant aux fils de plus petits calibres. Le chauffe-eau. Et les grosses cartouches des fusibles noirs par où passait le courant maximum. 

Il pesa sur le gros bouton de l'interrupteur.

Enleva les gros fusibles qu'il remplaça par des tourne-vis.

Dévissa les fusibles de verre et installa au bout les rondelles de métal. 

Lorsqu'il remettrait le courant. Il n'y aurait plus de gros fusibles noirs pour couper le surplus. Évitant le danger. Et le courant de l'extérieur, allant du fil souterrain irait directement sous les fusibles de verre dont l'élément intérieur sacrifiable et fondable ne pourrait interrompre le torrent d'électricité qui s'en irait irradier tous les fils de cuivre de la maison. Y compris ceux qui n'étaient conçu que pour l'éclairage et qui, probablement, fondrait. L'enveloppe de plastique des fils coulerait, chaufferait encore et prendrait feu. Entre les murs. Il y avait de ces fils partout. Pour l'éclairage, le chauffage. Derrière les murs, sous le plafond. Entre les planchers et les plafonds.

Monsieur Dickson remonta à la cuisine. Abandonnant tous ses morts.

Il y avait un poêle à gaz. 

Avec son couteau, il coupa le tube souple amenant le gaz de l'extérieur.

Il y avait un four à micro-ondes.

Il regarda dans l'armoire sous l'évier. Il y avait là différents produits d'entretien qu'il ne fallait surtout pas mélanger. Ce qu'il fit.

Il prit une tasse de verre contenant le mélange qui n'aurais pas dû exister.

Le plaça soigneusement dans le four. Car il ne fallait probablement pas le remuer.

Du moins exagérément.

Il pesa sur les boutons de commande de la minuterie du four à micro-ondes.

Il pesa sur les boutons de commande de l'intensité du four à micro-ondes.

Et la plate-forme du four se mit à rouler. 

Gronder.

Le four à micro-onde s'éclaira.

Et les ondes commencèrent à inonder la tasse de verre où il avait installer une boule de laine d'acier. Très utile pour récurer les chaudrons. 

Le tueur et tortureur de femmes était un homme soigneux. Les femmes apprécient qu'un homme partage les tâches ménagèrent et sache quoi faire de ses mains.

À ce moment, dans la cave ou le sous-sol ou le trou, ce qui avait été un homme n'avait plus de main. Et de bras. Il avait essayé d'enlever la grenade coincé entre sa chemise et son dos. Ce qui était difficile quand on déboule un escalier. Et c'est difficile aussi quand on est fixe et debout. La nervosité. Et la minuterie de la grenade est fort impatiente.

Il ne faut pas mettre de métal dans un four à micro-ondes.

Et les filaments de la boule de laine d'acier commençaient à briller dans le noir. Plus précisément, l'ombre, car le four était éclairé. Mais pas suffisamment. Ou assez pour un usage normal. Car rarement l'utilisateur du four à micro-onde surveille son fonctionnement. Probablement que ça arrive et qu'on peut y mettre un chat pour le voir griller vivant mais c'est sans doute rare. Quoiqu'il ne faille jurer de rien.

Il ne faut pas couper le tube d'alimentation du gaz du poêle à gaz.

Il ne faut pas mettre de rondelles ni de tournevis dans la boite de contrôle électrique. 

Monsieur Henry Dickson sortit de la maison-abattoir et boucherie transformée par ses soins appropriés en bombe à retardement.

C'était du bricolage et il était difficile de savoir à quel moment précis l'explosion arriverait.

Le courant circulant sans contrôle dans tous les fils de la maison. Vaste système sanguin moderne sans lequel il est impossible d'avoir une vie confortable et civilisée.

L'électricité qui cessait d'être une onde pour se transformer en chaleur à cause du frottement des particules dans les fils de cuivre qui chauffaient ensuite les gaines de plastique blanches et rouges et l'isolant entre les murs. Et le bois.

Et le gaz qui remplissait peu à peu toutes les pièces.

Son odeur d'oeux pourris. Parce que le gaz ne sent rien ce qui peut être dangereux et on y ajoute une substance qui avertit les gens des environs qu'il y a une fuite à proximité.

Et le four à micro-ondes qui grondait.

Bourdonnait.

Les filaments de fer de la laine d'acier Bulldog qui luisaient comme le feraient les filaments à l'intérieur d'une ampoule électrique à incandescence. 

Rougeoyaient. 

Le feu qui prenait dans les liquide puant contenu dans la tasse à mesurer en verre.

6 onces.

La porte du four à micro-onde soufflée par l'explosion.

Le gaz qui prenait feu dans la cuisine.

Les nuages enflammés roulant.

Et l'électricité qui enflammait l'intérieur des murs, des plafonds, des planchers. 

De la cave.

De la cuisine, de la salle à manger, du salon, de la salle de bain.

Des chambres de l'étage. Et de la salle de bain de l'étage.

Et le gaz qui.

Et les flammes qui.

Dans le rétroviseur de la Jeep de monsieur Dickson une montagne de feu remplaçait la maison. 

Qui explosa.

La nuit noire fut allumée avec une violence extrême. 

Le gaz est un combustible utile et une source de chaleur moderne et les accidents sont rares quoique les accidents puissent arriver.

Le hasard.

*

État 1 - 2 juin 2014
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