Gustave Doré. Dessinateur. 1832 - 1883
Gravure sur bois de 33 x 27 cm de Barbe Bleue. Graveur inconnu
Gravure sur bois de 33 x 27 cm de Barbe Bleue. Graveur inconnu
Les Contes de Charles Perrault. 1628 - 1703.
Publiée pour la première fois en 1862 par Pierre-Jules Hetzel
Publiée pour la première fois en 1862 par Pierre-Jules Hetzel
Fichier:Barbebleue.jpg
http://fr.wikipedia.org/wiki/Gilles_de_Retz
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LA BARBE BLEUE
«Il confie à sa jeune femme un trousseau de clefs ouvrant toutes les portes du château, mais il y a une petite pièce où elle ne doit entrer sous aucun prétexte. Curieuse, elle pénètre cependant dans la pièce interdite et y découvre tous les corps des précédentes épouses, accrochés au mur. Effrayée, elle laisse tomber la clef, qui se tache de sang. Elle essaye d'effacer la tache, mais le sang ne disparait pas car la clef est magique.
La Barbe bleue revient par surprise et découvre la trahison de sa femme. Furieux, il s'apprête à égorger cette épouse trop curieuse, comme les précédentes.»
http://fr.wikipedia.org/wiki/La_Barbe_bleue
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Pour cette petite clef-cy, c’est la clef du cabinet au bout de la grande gallerie de l’appartement bas ; ouvrez tout, allez par tout ; mais, pour ce petit cabinet, je vous deffens d’y entrer, et je vous le deffens de telle sorte que, s’il vous arrive de l’ouvrir, il n’y a rien que vous ne deviez attendre de ma colere. »
(...)
Elle fut si pressée de sa curiosité (...) elle y descendit par un petit escalier dérobé, et avec tant de précipitation qu’elle pensa se rompre le cou deux ou trois fois. Estant arrivée à la porte du cabinet. elle s’y arresta quelque temps, songeant à la deffense que son mari luy avoit faite, et considerant qu’il pourroit luy arriver malheur d’avoir esté desobéïssante ; mais la tentation estoit si forte qu’elle ne put la surmonter : elle prit donc la petite clef, et ouvrit en tremblant la porte du cabinet.
D’abord elle ne vit rien, parce que les fenestres estoient fermées. Aprés quelques momens, elle commença à voir que le plancher estoit tout couvert de sang caillé, et que dans ce sang se miroient les corps de plusieurs femmes mortes et attachées le long des murs (c’étoit toutes les femmes que la Barbe-Bleuë avoit épousées. et qu’il avoit égorgées l’une aprés l’autre).
Elle pensa mourir de peur, et la clef du cabinet, qu’elle venoit de retirer de la serrure, luy tomba de la main.
Aprés avoir un peu repris ses esprits, elle ramassa la clef, referma la porte, et monta à sa chambre pour se remettre un peu ; mais elle n’en pouvait venir à bout, tant elle estoit émeuë.
Ayant remarqué que la clef du cabinet estoit tachée de sang, elle l’essuia deux ou trois fois ; mais le sang ne s’en alloit point : elle eut beau la laver, et mesme la frotter avec du sablon et avec du grais, il y demeura toûjours du sang, car la clef estoit fée, et il n’y avait pas moyen de la nettoyer tout à fait : quand on ôtoit le sang d’un costé, il revenoit de l’autre.
(Son mari, à son retour, lui demande de lui ramener les clés, ce qu'elle fait, sauf une. À force de la redemander, elle la lui amène)
« Pourquoy y a-t-il du sang sur cette clef ?
— Je n’en sçais rien, répondit la pauvre femme, plus pasle que la mort.
— Vous n’en sçavez rien ! reprit la Barbe-Bleuë. Je le sçay bien, moy. Vous avez voulu entrer dans le cabinet ! Hé bien, Madame, vous y entrerez, et irez prendre votre place auprés des dames que vous y avez veuës. »
Elle se jetta aux pieds de son mari en pleurant, et en luy demandant pardon, avec toutes les marques d’un vrai repentir, de n’avoir pas esté obëissante. Elle auroit attendri un rocher, belle et affligée comme elle estoit ; mais la Barbe-Bleuë avoit le cœur plus dur qu’un rocher.
« Il faut mourir, Madame, luy dit-il, et tout à l’heure.
(...)
Cependant, la Barbe-Bleuë, tenant un grand coutelas à sa main, crioit de toute sa force à sa femme
(...)
Puis, la prenant d’une main par les cheveux, et de l’autre levant le coutelas en l’air, il alloit luy abattre la teste.
(...)
MORALITÉ
La curiosité, malgré tous ses attraits,
Couste souvent bien des regrets ;
On en voit, tous les jours, mille exemples paroistre.
C’est, n’en déplaise au sexe, un plaisir bien leger.
Dés qu’on le prend, il cesse d’estre.
Et toûjours il couste trop cher.
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LA BARBE BLEUE
«Il confie à sa jeune femme un trousseau de clefs ouvrant toutes les portes du château, mais il y a une petite pièce où elle ne doit entrer sous aucun prétexte. Curieuse, elle pénètre cependant dans la pièce interdite et y découvre tous les corps des précédentes épouses, accrochés au mur. Effrayée, elle laisse tomber la clef, qui se tache de sang. Elle essaye d'effacer la tache, mais le sang ne disparait pas car la clef est magique.
La Barbe bleue revient par surprise et découvre la trahison de sa femme. Furieux, il s'apprête à égorger cette épouse trop curieuse, comme les précédentes.»
http://fr.wikipedia.org/wiki/La_Barbe_bleue
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Charles Perrault
Histoires ou Contes du temps passé
Édition de 1697
Wikisource. La bibliothèque libre
« Voilà, luy dit-il, les clefs des deux grands gardemeubles ; voilà celles de la vaisselle d’or et d’argent, qui ne sert pas tous les jours ; voilà celles de mes coffres forts, où est mon or et mon argent ; celles des cassettes où sont mes pierreries, et voilà le passe-partout de tous les appartemens.
Pour cette petite clef-cy, c’est la clef du cabinet au bout de la grande gallerie de l’appartement bas ; ouvrez tout, allez par tout ; mais, pour ce petit cabinet, je vous deffens d’y entrer, et je vous le deffens de telle sorte que, s’il vous arrive de l’ouvrir, il n’y a rien que vous ne deviez attendre de ma colere. »
(...)
Elle fut si pressée de sa curiosité (...) elle y descendit par un petit escalier dérobé, et avec tant de précipitation qu’elle pensa se rompre le cou deux ou trois fois. Estant arrivée à la porte du cabinet. elle s’y arresta quelque temps, songeant à la deffense que son mari luy avoit faite, et considerant qu’il pourroit luy arriver malheur d’avoir esté desobéïssante ; mais la tentation estoit si forte qu’elle ne put la surmonter : elle prit donc la petite clef, et ouvrit en tremblant la porte du cabinet.
D’abord elle ne vit rien, parce que les fenestres estoient fermées. Aprés quelques momens, elle commença à voir que le plancher estoit tout couvert de sang caillé, et que dans ce sang se miroient les corps de plusieurs femmes mortes et attachées le long des murs (c’étoit toutes les femmes que la Barbe-Bleuë avoit épousées. et qu’il avoit égorgées l’une aprés l’autre).
Elle pensa mourir de peur, et la clef du cabinet, qu’elle venoit de retirer de la serrure, luy tomba de la main.
Aprés avoir un peu repris ses esprits, elle ramassa la clef, referma la porte, et monta à sa chambre pour se remettre un peu ; mais elle n’en pouvait venir à bout, tant elle estoit émeuë.
Ayant remarqué que la clef du cabinet estoit tachée de sang, elle l’essuia deux ou trois fois ; mais le sang ne s’en alloit point : elle eut beau la laver, et mesme la frotter avec du sablon et avec du grais, il y demeura toûjours du sang, car la clef estoit fée, et il n’y avait pas moyen de la nettoyer tout à fait : quand on ôtoit le sang d’un costé, il revenoit de l’autre.
(Son mari, à son retour, lui demande de lui ramener les clés, ce qu'elle fait, sauf une. À force de la redemander, elle la lui amène)
« Pourquoy y a-t-il du sang sur cette clef ?
— Je n’en sçais rien, répondit la pauvre femme, plus pasle que la mort.
— Vous n’en sçavez rien ! reprit la Barbe-Bleuë. Je le sçay bien, moy. Vous avez voulu entrer dans le cabinet ! Hé bien, Madame, vous y entrerez, et irez prendre votre place auprés des dames que vous y avez veuës. »
Elle se jetta aux pieds de son mari en pleurant, et en luy demandant pardon, avec toutes les marques d’un vrai repentir, de n’avoir pas esté obëissante. Elle auroit attendri un rocher, belle et affligée comme elle estoit ; mais la Barbe-Bleuë avoit le cœur plus dur qu’un rocher.
« Il faut mourir, Madame, luy dit-il, et tout à l’heure.
(...)
Cependant, la Barbe-Bleuë, tenant un grand coutelas à sa main, crioit de toute sa force à sa femme
(...)
Puis, la prenant d’une main par les cheveux, et de l’autre levant le coutelas en l’air, il alloit luy abattre la teste.
(...)
MORALITÉ
La curiosité, malgré tous ses attraits,
Couste souvent bien des regrets ;
On en voit, tous les jours, mille exemples paroistre.
C’est, n’en déplaise au sexe, un plaisir bien leger.
Dés qu’on le prend, il cesse d’estre.
Et toûjours il couste trop cher.