Henry Dickson écoute la radio FM de Radio Canada avant qu'un nouveau directeur de la programmation innovateur change les émissions sous prétexte qu'il ne voulait pas que sa station continue à servir d'assistance sociale à des écrivains, poètes et artistes miséreux. Et tout un tas de vieux qui seraient mieux d'aller dans un foyer pour infirmes. Il avait des subventions de l'État, des cotes d'écoute, des responsabilités et devait rendre des comptes. Ce qui était tout à fait logique. Mais les nouveaux directeurs de programme font toujours ça. Ils veulent améliorer les choses. Ils ne peuvent pas s'en empêcher. Et lorsqu'ils ont bien amélioré, ils s'en vont améliorer autre chose.
PROFESSION
_ Votre métier?
Demande l'animateur
_ Je n'en ai pas.
Répond l'invité que l'on apparendra à connaître et peut-être pas à aimer. De toute façon, il n'y tient pas tant que ça. Il dira détester les contacts humains. Et l'animateur sera emporté par la vague d'innovation et de rajeunissement. Pour le moment, on n'entend que leurs voix. Celle de l'animateur, un spécialiste qui sait comment animer et occuper l'espace et le temps en parlant tout le temps. Il n'y a rien de pire que le silence à la radio sinon les silences à la radio. Il fut un temps où un trou d'une seconde pouvait vous faire jeter à la rue. L'autre, moins bavard, répondait quand on lui posait des questions. Ce qui n'est pas si courant. Et il répondait aux questions. Ce qui encore est peu fréquent. Les gens sont si habitués aux reptations des politiciens qu'ils finissent par croire que parler pour ne rien dire et répéter sans cesse le même couplet qui ne veut rien dire est la forme naturelle de la conversation. Comme ils sont peu habitué d'entendre quelqu'un d'intelligent parler - il y en a très peu dans la population et il y a donc peu d'occasion où se rencontreront quelqu'un d'intelligent qui parle et quelqu'un d'intelligent qui écoute et les gens intelligents, ils sont prudents, parce qu'ils sont intelligents, ils ont appris à se taire et à ne pas se faire remarquer.
_ Ça commence bien.
Se désole l'animateur.
_ Mais tout le monde fait quelque chose, non ?
_ Et vous voyez le résultat. Si tout le monde se retenait un peu, ce serait mieux. Peut-être.
_ Mais il faut bien vivre?
_ Je n'en vois pas la raison.
_ Mais les gens...
_ Je connais des tas de gens et je me demande souvent pourquoi ils vivent. Et je ne trouve pas d'explication. L'habitude?
_ Vous préféreriez qu'ils soient morts?
_ Oui. Mais la majorité sont déjà morts.
_ Quelques personnes ayant ces idées ont voulu récemment précipiter les choses. Avec des fusils. Le dernier dans une salle de cinéma.
_ En naissant, tu es déjà mort. Ou comme disaient les anciens: tu dois une mort. Et elle va venir te la réclamer inévitablement un jour. Ou comme disait d'autres anciens, si tu te tiens sur le bord d'une rivière, un jour, tu verras passer au fil de l'eau le cadavre de ton ennemi. Alors pourquoi précipiter les choses? Mon ennemi est déjà mort. Et je ne tue pas les animaux. Je suis végétarien.
_ Et puisqu'on y est: avez-vous une explication sur les gestes de ces gens. Pensez au jeune homme qui a tué toutes ces étudiantes.
_ Et ça vous surprend?
_ Vous trouvez ça naturel de tuer des femmes et des étudiantes?
_ Tout à fait naturel.
_ Les auditeurs seront ravis de l'entendre. Surtout les familles de...
_ On a fait ça tout le temps. Il faut savoir de qui on parle et à qui on s'adresse. Haïr est naturel. Il y a même des catégories et des classifications. Les gens qui ne sont pas intelligents, la majorité de la population, détestent instinctivement, méprisent, les gens intelligents et tout ce qu'ils font: livre, art, machin. Le réflexe naturel est de mettre le feu dans une bibliothèque. Ce qui est interdit. Mais régulièrement, on le permet, alors on se défoule. Avec les musées aussi. Quoi de plus beau que de voir un musée brûler! Ça élève l'âme ou la chose qui en tient lieu chez les sous-hommes. Alors entrer dans une école ou une université ou une salle de cinéma avec un fusil.
_ Vous dite que les gens ordinaires détestent les gens intelligents.
_ Non seulement, ils les détestent mais ils ont envie de les tuer. Parfois, ils les tuent. Tout ce qui est différent aussi. Pas seulement ce qui est intelligent.
_ Mais je ne connais personne comme ça. Et, pourtant, je vois beaucoup de gens dans mon métier.
_ Si vous lisez un peu les livres d'Histoire, vous réaliserez que depuis que l'Homme existe, il tue et il se tue pour toutes sorte de raisons. L'Homme est un tueur né. Ou, si on est plus gentil, on dit comme Freud à propos des enfants que ce sont des pervers polymorphes. Que quelqu'un tue quelqu'un ne me surprend pas du tout. C'est le fait que ça surprenne encore après 10,000 ans ou 500, 000 ans d'activité qui devrait être surprenant. Les gens n'apprennent rien, ne comprennent rien. Ils ne savent pas reconnaître ce qu'ils voient.
_ Mais encore une fois, ce n'est pas ce que je vois et ce que je comprend. Il y a bien des conflits. Ailleurs.
_ Ils sont toujours supris. Du petit descendant de singe, menacé par toutes les créatures à dents, on est passé au prédateur suprême qui a tué ou mis en cage tous les autres prédateurs. Et quelque centaines de millions de ses semblables. Et qui s'apprête à détruire la Nature. Ce qui le détruira.
_ Alors vous aussi, vous dites que la Nature est menacée.
_ Non. Ce n'est pas ce que je dis. Quoique la petite vermine appellée Homme fera, elle ne peut rien. Ou que faire des ravages superficiels. Qui provoqueront sa perte. Ce qui sera une bonne chose. Parce qu'aussi coriace et vicieux qu'il soit, il n'est encore et ne sera toujours qu'une espèce animale parmi d'autres. Les puces sur le chien. Lorsqu'il aura détruit son écosystème et son chien, il crèvera.
_ Et ensuite?
_ Il sera remplacé par une autre espèce. Ce qui n'aura aucune importance.
_ Vous êtes écologiste?
_ Non. Je fais mon compost, je recycle mes boites de conserve. Pas plus.
_ Vous ne voulez pas sauver la Nature?
_ Je n'aime pas la Nature. La Nature est jolie quand on la regarde de loin. Dans chaque brin d'herbe ou goutte d'eau, il y a un abattoir. Tout ce qui a été créé est de la nourriture à pattes pour un prédateur à bec et griffe. Qui sera lui-aussi, lorsqu'il sera vieux ou blessé, dévoré par de plus petites bêtes. Dévoration incessante. Quant à sauver la nature ou la préserver. Problème de vocabulaire et de mauvaise poésie. Les savants, les seuls qui ont les connaissances pour décrire ce qui se passe - les savants, pas les politiciens, les économistes ou les investisseurs ou les entrepreneurs ou spéculateurs- disent que ça va mal et que rempirera.
_ Et le rôle des militants écologistes là-dedans?
_ Vous l'avez dit: ce sont des militants. Les savants sont sur le terrain ou dans leur labo, ils n'ont pas le temps pour faire autre chose. Alors qui des gens qui ont le temps, des gens qui ne sont pas des savants et qui sont plus intelligents que beaucoup les prennent au mot et décide de faire évoluer les mentalités. Ils ont compris ce qui leur pend au bout du nez.
_ Et le reste des gens moins intelligents?
_ Ils magazinent. Polluent. Ils font ce que les gens pas intelligents font dans les pays riches.
_ Les écolo disent que la Nature est en danger.
_ C'est là que mes mots diffèrent des leurs. Ils sont trop sentimentaux. Ce qui prouve que tout intigents qu'ils soient, ils le sont moins que les savants. Ils ont le frisson, devinent ce qui va se passer, ont la chienne.
_ La Nature n'est pas en danger?
_ Alors les politiciens ont raison
_ Tout le monde a raison. Quoique les politiciens disent au gros public pour le rassurer, ils savent très bien ce qui va se passer. Mais pour eux et leurs commanditaires, ceux qui les paient, ce sera une occasion d'affaires de plus. Les pôles fondent. Tant mieux. On explorera pour trouver du pétrole. Construira des plate-formes pétrolières, des pipelines. Fera passer des pétroliers. Construira des ports. Des aéroports. Des lignes de chemin de fer. Des autoroutes. Des villes. Des mines. Le climat se réchauffe tant mieux. On se bronzera au pôle. On construira des hôtels. Et d'un autre côté, c'est leur unique différence, ils disent que tout ça est l'effet de la Nature, un autre cycle et non provoqué par les activités polluantes des hommes ordinaires, des hommes d'affaires.
_ Et ce n'est pas une bonne chose. Tout le monde profitera de cette richesse.
_ La richesse profite aux riches. Ce n'est pas aujourd'hui ou demain que ça changera.
_ Et la Nature.
_ La Nature tuera tout le monde et se portera comme un charme. Et la Terre a encore, selon d'autres savants, 5 milliards d'années à vivre avant que le soleil, son étoile, n'implose et ne devienne un trou noir qui avalera tout ce qui vit. Toutes les planètes et les système solaire au complot. Et la Terre. Et les hommes s'il en existe encore. Ou la bombe atomique qu'est le soleil cessara d'exploser faute de combustible et gèlera. Ce qui aura le même effet.
_ Quant aux hommes?
_ Si tu pisses et chie dans ta source et que tu bois ensuite, ne te surprend pas d'être malade.
_ Et si les politiciens disent que le cancer de la peau est bon pour la santé ?
_ Faut pas les croire.
_ Et vous voulez empêcher que l'Homme se détruise lui-même?
_ Pas du tout. Je suis misanthrope. Si l'Homme est assez stupide pour s'exterminer, tant pis ou tant mieux.
_ Donc, si l'Homme est assez sage, il...
_ Et s'il continue à rester stupide, il...
_ Et à quoi occupez-vous la majorité de votre temps?
_ À dormir. J'aime dormir.
_ Vous ne voyez personne?
_ Quand il m'arrive de voir des gens, quoiqu'on fasse, même si on n'y tients pas tant que ça, on en croise, fatalement. Puisqu'il y en a partout.
_ Fatalement ?
_ Pour moi, voir quelqu'un n'est pas nécessairement une bonne nouvelle.
_ Mais vous ne leur dites pas.
_ Je ne suis pas Diogène
_ Ce qui veut dire?
_ Les gens cognent.
_ Et si vous ne travaillez pas, vous faites quoi?
_ Chez les aristocrates, le travail était une infamie, une humiliation réservée aux serviteurs, esclaves, prisonniers et condamnés. Aux animaux. Des inférieurs que leur état misérable condamnait à travailler pour vivre. Les êtres supérieurs pensaient. Pas tout le temps, on l'aurait su mais ils le prétendaient. Même le mot travail décrivait un instrument de torture. Ceux qui devaient le faire parce qu'ils avaient eu la malchance de naître chez des pauvres, s'ils étaient assez intelligents pour se rendre compte de leur situation et assez énergiques et volontaires pour tenter de s'en sortir, essayaient de trouver un travail qui leur permettrait un jour de ne plus avoir à travailler. Ou exploitaient leurs voisins. Les choses ont changé, on se fait une gloire de travailler. On s'en vante. Même les gens qui sont assez riches pour ne rien foutre prétendent travailler.
_ Vous ne semblez pas les aimer?
_ Pourquoi j'aimerais les gens. Je ne suis pas catholique.
_ Aimer votre prochain, tout ça?
_ Une fois que vous le connaissez votre prochain, vous n'avez plus aucune envie de lui parler. Encore moins de l'aimer. La religion catho a voulu faire des saints avec des scorpions, voyez le résultat. Même les scorpions sont devenus évêques.
_ Vous n'aimez pas les gens et encore moins les riches?
_ Si les gens sont dangereux, ceux qui dirigent le sont encore plus. Ils ont les moyens de faire des tas de dégats. Et ne s'en sont pas gênés tout le long de l'Histoire.
_ Les gens qui dirigent, les chefs d'entreprise ne sont pas tout le temps ce que vous dites.
_ Qu'on dirige une PME, une grosse compagnie, une prison, une église, un État. Si on est puissant, on est dangereux. Et, inévitablement, on va forcer les gens à faire ce qu'on veut qu'ils fassent. C'est comme une fille qui arrive à son party d'anniversaire. Elle découvre qu'il n'y a que des gars. Nus. En érection. Qui ont envie de lui faire sa fête.
_ Si quelqu'un a du pouvoir, il s'en servira mal.
_ Inévitablement.
_ Tout dépend de l'étendue de son pouvoir.
_ C'est comme le courant électrique. Si vous prenez un choc d'une prise de 110 volts, les dégâts ne sont pas les mêmes qu'avec une 220 ou une 600.
_ Et votre conseil
_ Vous vous tenez loin d'eux. Comme la fille de tantôt avec ses violeurs potentiels.
_ Comme s'ils n'avaient pas assez de défauts, vous leur en ajouter.
_ Les gens ordinaires, sans pouvoir, ont les défauts qu'ils peuvent. Des défauts économiques. Mais si vous avez les moyens, vous pouvez les accumuler. Il leur prend une autre maladie, très ancienne, l'avarice et la cupidité parce qu'il leur faut avoir le plus de fric possible. Assez n'existe pas. Et le mot trop, pas vu. Même si toute une vie ne suffirait pas à le dépenser. Comme s'ils devaient vivre plusieurs vies. Sans penser que ce seront leurs veuves et les enfants de leurs veuves qui en profiteront.
_ C'est la vie.
_ Et c'est dans cette vie que l'on veut que je vive?
_ Et tous les autres?
_ Et tous les autres pauvres et moins pauvres admirent ces riches.
_ Ce qui prouve, pour vous, qu'ils ne sont pas intelligents?
_ Le liève n'admire pas le chasseur de lièvre ou le trappeur ou les taxidermistes ou les renards. C'est contre nature.
_ Vous n'admirez pas, c'est le moins qu'on puisse dire.
_ On ne devient riche qu'en faisant travailler les gens à sa place. Ou, dans notre système captitaliste, en les faisant travailler pour soi. Ce qui serait une vertu. En leur donnant du travail. Ce qui vous vaut une médaille. Et ils sont entourés de gens qui veulent qu'on leur donne du travail. Exploitez-moi. Ils font le trottoir pour qu'on les encule.
_ Et l'$ des riches est celui des pauvres.
_ Le calcul est simple. Vous payer machin un salaire de X pour faire Y. Y vous rapporte 100 X. Vous donnez toujours X à machin et vous empochez 99 X. Et si vous vendez votre entreprise, ce que vous ferez inévitablement quand le prix sera le bon ou c'est la mode chez les inventeurs d'internet. Vous la vendez 1 milliard. Vous gardez ce milliard. Vous considérez que ceux qui ont travaillé avec vous pour créer cette entreprise on eu assez d'$. En fait, vous n'y pensez même pas. Est-ce que le fermier pense à ses vaches, ses cochons ou ses poules. L'acheteur de votre entreprise, gardera le nom, foutra tout le monde à la porte et fera faire les trucs que vous faisiez au Mexique ou en Chine ou dans des endroits encore plus misérables. Il faut qu'il rembourse la banque pour tout le fric qu'elle a payé pour votre entreprise. Le calcul changera. Machin Chinois ou Pakistanais sera payé 1/2 X ou 1/10 de X. Il produira encore une valeur de 100 X. Et imaginez ce qu'empochera le boss. C'est ainsi qu'on crée de la richesse. Le slogan de tout politicien. Que vous travaillez pour un casse-croute dirigée par une folle ou une multinationale. La richesse est crée par la majorité et empochée par la minorité. Qui trouve en plus le temps de venir donner des leçon de morale à la masse. On lui dira qu'elle n'est pas assez excellente, productive. On comparera sont temps de travail avec des esclaves d'autres provinces ou pays et on hochera la tête de déception. Les politiciens continueront à jouer au curé. Travaillez plus! Travaillez plus longtemps! Créer de la richesse. Sans compter les théologiens du veau d'or qui pullulent dans tous les médias. Et les universités. Certains sont payés pour ça. Les autres le font gratis. Et ils n'auront même pas la joie de lécher les bottes de leurs idoles. Pour un lèche-bottes professionnels, il y a 100 amateurs qui lèchent pour la beauté de la chose. Parce que c'est plus fort qu'eux.
_ Et vous protestez?
_ Non.
_ Vous voulez améliorer les conditions des travailleurs?
_ Il y en a qui le font très bien. Mais les esclaves sont les responsables de leur esclavage. Ils forment la majorité de la population. Dès qu'ils seront tannés, tout changera. Sans leur participation active et enthousiaste, le système s'effondrerait. Si les esclaves sont trop stupides pour ne se rendre compte qu'ils sont exploités ou s'ils sont encore plus stupides et veulent absolument continuer à être exploités qu'est-ce que je pourrais changer?
_ Vous dites que les utopistes finissent crucifiés.
_ Ou ils crucifient les autres s'ils ont du succès.
_ Et que faudrait-il faire?
_ Il faudrait une autre espèce. Une autre varité d'humain. Demandez ou espérez l'aide de l'Évolution. Les fourmis élèvent des pucerons et les traient. Notre système fonctionne grâce à travail et à l'énergie du bétail humain. Qu'on paie le moins cher possible pour que les fermiers soient contents.
_ Vous êtes Marxiste?
_ Je décris une situation. Si les gens sont heureux ainsi, ce n'est pas moi qui leur enlèverai leur petit bonheur. L'illusion et l'espoir sont nécessaires à la plupart des gens.
_ Mystification, aveuglement, chimère, hallucination, imposture, manipulation, hypocrisie, superstition. Vous utilisez des mots durs.
_ Les mots ne sont jamais assez durs. La réalité est très très dure sans se forcer. Elle peut vous écraser comme rien.
_ Vous ne tenez pas à améliorer la société?
_ Je ne dis pas qu'elle n'est pas améliorable ou n'aurait pas besoin de rénovation urgente mais ce n'est pas mon boulot. Les rénovateurs de ce genre finissent crucifiés ou s'ils tiennent vraiment à améliorer l'humain, il faut une bonne police et des camps. À la nazi ou la communiste. On donne des permis d'accoucher. Et on castre ceux qu'on ne veut pas voir se reproduire.
_ On revient toujours à la ferme et à l'esprit fermier.
_ Nous sommes élevés comme du bétail et on nous utilise.
_ Vous ne critiquez pas le capitalisme?
_ Ça a toujours existé. Depuis qu'on échangeait des coquillages ou des plume contre un truc. Depuis qu'on a abandonné le troc. Quelque chose de plus léger et de brillant contre quelque chose de lourd ou qu'on ne peut déplacer ou qu'on utilisera plus tard. L'Homme aime fabriquer des choses et les vendre contre d'autres choses. Ou acheter des choses que font d'autres hommes pour les vendre. C'est le début du commerce. Et étant donné ce qu'est l'Homme, il est évident qu'il va abuser du plus faible et l'exploiter. C'est un don naturel. Une sangsue ne change pas. On était cannibale et la victime ne servait qu'une fois. On a découvert qu'on pouvait améliorer le processus en exploitant indéfiniment sa victime. En forçant sa victime à travailler et en exploitant le travailleur le plus longtemps possible. Et on peut le manger tous les jours. Tuer un boeuf, tu ne peux que le tuer une fois. Mais si tu lui mets un joug, il labourera ton champs chaque jour. Contre de l'eau et du foin.
_ J'ai votre petit livre, c'est écrit sur la couverture: Contre Tout! N'est-ce pas un peu radical
_ Je suis cynique,
_ C'est écrit aussi: sceptique, contrarien, nihiliste, Pyrrhonien...
_ Et c'est ?
_ Le premier des sectiques grecs, le plus connu. Il y a sans doute des sceptiques avant mais on ne les connaît pas.
_ C'est aussi écrit: Petit traité de philosophie
_ C'est petit. Le livre est petit. Et il n'y a pas beaucoup de pages. Je n'ai pas beaucoup de choses à dire.
_ Qui lit ça?
_ Personne. C'est comme la poésie. On est de la culture du livre, on aime lire des livres et en faire.
_ Vous le vendez?
_ Je le donne. J'en ai toujours quelques exemplaires dans une poche. C'est juste du bon format. Mince. Étroit. Léger. Ça ne déforme pas. Si je rencontre quelqu'un d'aimable et que j'aime sa conversation, je lui donne.
_ Si c'est un traité de philosophie, vous êtes donc philosophe.
_ Pourquoi pas?
_ Vous avez étudiez ça?
_ Surtout pas. À l'université, on fabrique des profs de philosophie.
_ Quel est le mal?
_ Et les profs de philo enseigneront l'histoire de la philo et la biographie des philosophes. Pas comment en faire. De toute façon, s'ils sont allé étudier cette discipline, c'est qu'ils n'étaient pas doués pour en faire.
_ Vous êtes cruel?
_ Les profs de philo sytle Aristote ou les académiciens sont là pour adapter les gens à la société quand la religion qui a aussi le même but ne les atteint plus. Et même elle est maintenant réservée aux plus pauvres et aux moins intelligents. Il y a aussi la TV qui la concurrence. Le cerveau universel, central, si on veut appeler ça comme ça. Ce genre de philosophe, de moraliste ou de profs d'Histoire ou d'animateur de jeux TV paraissent avoir des disciplines différentes mais qui ont le mêmes but: vous avez de la chance, vous êtes nés dans la meilleure société du monde. Les autres n'ont pas cette chance. Surtout, ne changez rien. Vous avez une tête ronde, on forcera autant que nécesaire pour la faire entrer dans un trou carré. C'est ce que fait ce genre de philosophe là. Et si vous jouez bien, avec enthousiasme, vous aurez un prix.
_ Et ceux de votre genre?
_ Ils se posent des questions. Se demandent pourquoi les choses sont comme ça alors qu'elles pourraient être autrement. Je dirais que je suis toujours surpris de ce que je vois. Et je suis aussi surpris que tant de gens, la majorité, ne soient jamais surpris.
_ Vous êtes cruel
_ J'aime la cruauté. Le Monde est cruel. Les gens sont cruels.
_ Et la philosophie?
_ Pensez-vous que Socrate, Nietzsche, Cioran, Diogène auraient été acceptés dans une université? Cioran y est demeuré à faire semblant d'étudier le plus longtemps possible jusqu'à ce qu'on le foute à la porte parce que ça lui permettait d'avoir une chambre et des rabais à la cantine. Tout d'un coup, un administrateur s'est rendu compte qu'il avait l'air bien trop vieux pour être un étudiant comme tout le monde. Professeur, c'est un métier. Pas philosophe. C'est comme être poète officiel du gouvernement, ça se peut pas.
_ Ça existe.
_ Et ça fait des rimes à la demande pour dire du bien des soldats qui ont massacré les Libyens.
_ Vous ne semblez pas aimer les professeurs?
_ J'ai été à l'école comme tout le monde. Obligé. J'en ai vu. En gros, 50 % sont compétent et savent enseigner. Le reste... Et lorsque j'ai compris dans quelle usine j'étais, j'ai foutu le camps à 14 ans. Et je me suis mis à m'enseigner moi-même ce qui m'intéressais ou ce que je pensais devoir connaître.
_ Et l'autre 50%
_ Au mieux, des gens qui connaissent leur matière mais sont incapables de l'enseigner. Ou de gentils incompétents qui ne savent rien ou ont oublié ou s'en foutent et qui ne sont pas dangereux.
_ Mais certains sont dangereux.
_ Très dangereux.
_ Dangereux? Vous voulez parler des pédophiles?
_ Je n'en ai pas connu. D'autres n'ont pas eu cette chance. Mais il n'y a que ça. L'Homme a une inventivité infinie pour nuire ou exploiter les gens. Physiquement, mentalement, sexuellement.
_ Vous semblez négliger la gravité du sujet?
_ Illusion médiatique. Comme le temps d'attention de la moyenne des télespecteurs et des journalistes et animateurs est brefs, on se concentre sur un sujet et on le pioche. Jusqu'à ce qu'il n'y ait plus que ça, que vous pensiez qu'il y en a partout. C'est comme les noyades dans les piscines. Il y a 10. Le même nombre que les autres années et on en parle tant qu'on pense que c'est une épidémie et qu'il y en a 100.
_ Il y a eu plus que 10 noyades
_ On se noie partout. Dans les piscines mais surtout ailleurs. Bizarrement, là où il y a de l'eau. Et il y a de l'eau partout. Sur le bord des plages, dans les rivières, les lacs, les carrières désaffectées. Comme on fait du parachutisme. S'il vous arrive de mal tomber et ça peut vous arriver. Alors, vous risquez de vous tuer. Parce que se jeter de 1000 pieds dans les air du haut d'un avion est dangereux. L'eau est dangereuse, si vous l'approchez tant pis pour vous.
_ Vous semblez prendre à la légère tout le tort que ces dépravés peuvent faire?
_ Les humains sont dépravés. La dépravation et les perversions sont humaines. Encore là, je suis surpris qu'on soit supris. On met des jeunes enfants ignorants sous contrôle d'un adulte et on est surpris du résultat.
_ Inévitable.
_ Statistiquement. Mais il peut vous arriver pire. C'est humain, là où il y a des enfants, il y a des pédo. Ils sont attirés comme des aimants ou des boussoles vers tout ce qui est métallique. École, église, colonie de vacance, camps sportif, scout, cadet, armée, administration, entreprise, là ce ne sont plus des enfants mais les amateurs de chair fraîches sont là aussi.
_ C'est un scandale.
_ Encore une fois, vous ignorez tout de l'Homme. Tout ça a été rendu illégal par les catho. C'était normal au Japon ou, avant, dans l'Islam ou, avant, chez les Romains. On comprenait les besoins des hommes comme ils étaient et ne s'en faisaient aucune illusion. Vous avez envie de quelque chose, pourquoi vous priver?
_ Mais les victimes ne peuvent se défendre?
_ C'est la beauté de la chose. Vous ne semblez pas bien saisir le mot «exploitation». Abuser des plus faibles est irrésistible.
_ Pour vous ce ne devrait pas être interdit?
_ Il y a eu des militants au temps des revendications féministes. Ça n'a pas rapport mais c'est arrivé au temps où bien des gens militaient. Qui disaient prendre soin des besoins des enfants. Il voulait que la pédophilie soit reconnue comme une variation du goût et que cesse la répression. Comme tous les militants, ils avaient tout un lot d'explications. Mais c'est toujours interdit. Je ne dis pas que ça le sera toujours étant donné le nombre de personnes qui ont ces goûts-là. C'est comme l'homosexualité...
_ Tous les homosexuels ne sont pas pédophiles!
_ L'homosexualité, encore une fois permise ou tolérée a depuis toujours a été interdite, parfois, sous peine de mort. Ce qui n'a pas empêché que les gens intéressés continuaient à la pratiquer en secret. Jusqu'à tout récemment, ça a fait parti des maladies mentales qu'on devait soigner: électrochocs, trépanation. C'était un acte criminel. Pas simplement chez les nazis avec leur triangle rose. On ne mettait plus en prison et on ne fouettait plus, on ne pendait plus, ne castrait plus ou ne coupait en morceaux les sodomites, on les enfermait dans un asile. On essayait de les rééduquer et de les guérir de leur perversion. Les temps on changé.
_ Et vous croyez qu'un jour, il en sera de même pour la pédophilie
_ Combien de gens sont véritablement hétéro? 50%. Certains disent 10 %. Les autres vont et vient selon les occasions. Si les occasions ne se présentent pas et que la société interdit les autres alternatives, ils choisiront prudamment le sexe opposé d'âge vénérable. Même si l'attirance naturelle est la jeunesse. Et les véritables homo, certains disent aussi 10%, choisiront. Le reste, des bisexuels en attente de la première tentation. On connaît les coutumes anciennes. Celle d'avant le Christianisme officiel. En fait, on n'en sait pas grand chose parce que les études sur la sexualité sont assez récentes. C'était tabou jusqu'à tout récemment. Tout le monde baise mais c'est dégoûtant et il ne surtout pas en parler. On fait comme si ça n'existe pas. La jeune vierge totalement ignorante de ce qu'on appelait les réalités de la vie découvre une fois unie légalement avec tous les papiers et l'eau bénite du curé que son vieux nouveau mari a soudainement envie de se mettre tout nu et tient à la voir nue, qu'il n'est pas fait comme elle et a d'autres envies qu'elle ne comprend pas mais apprendra de gré ou de force dans un moment. Ça c'est la sexualité normale comme on l'aime.
_ Et les pédo?
_ Qui sait? En se fiant aux anciens et avec les nouvelles des scandales réguliers dans tous les milieux, pourquoi pas 10% de la population. Ou plus. 10 % en activité malgré l'interdiction et la répression. Peut-être 50% de la population. Avec toutes sortes de catégorie. Très jeune. Jeune. Il faudrait faire un sondage chez les producteurs de films porno. Eux le savent ce qui se vend.
_ Ça en fait du monde!
_ 10 % de la population, c'est du monde.
_ Et d'après vous, ce sera légalisé un jour. Comme les droits des gais, des féministes, des noirs ?
_ Je ne fais pas de prédiction. Vous me demandiez mon métier: je dirais que j'aime étudier l'Homme. Ce n'est pas un métier. Disons, une fantaisie, comme cueillir des champignons ou étudier les timbres. Cueillir des champignons est un art martial.
_ Vous aimez l'Homme. Suprenant, d'après ce que vous disiez, j'avais cru comprendre...
_ Vous aviez bien compris et vous avez cessé de comprendre. J'aime étudier l'Homme, comme on observe un virus, une maladie, une moisissure. Je n'aime pas l'Homme.
_ C'est vrai, vous avez dit que vous étiez misanthrope
_ Je l'avais dit. Parfois, on dit des choses.
_ Vous croyez donc que l'Homme est mauvais?
_ On peut utiliser ce terme. Mais, encore une fois, ces mots appartiennent à une religion ou à la police. Il n'y a pas de Bien ou de Mal. Une société décide que ceci est cela, que ça va s'appeler ainsi. Elle fait une liste. Dorénavant, il y aura les nôtres et les autres. On coupera le prépuce des bébés et les clitoris des filles. Aussi ridicule que ça soit, on le fait encore. On tient absolument à couper le bout du zizi des garçons. Des gens sérieux. Religieux. Et tout. Avant, ils le suçaient après l'avoir découpé. Parce que la salive désinfectait. Supposément. On dit qu'ils le le font pas. La fascination pour le sang. Et les zizis des bébés et des enfants. Et on parlait de la pédophilie? Hum! C'est mauvais la pédophilie? Vraiment mauvais. Mon Dieu comme c'est mauvais. On ne se retient plus. Et l'exploitation sexuelle des enfants. c'est mauvais aussi. Et l'exploitation religieuse et sexuelle des enfants pas des sorciers musulmans, juifs, africains? Et il y a toutes sortes d'association sérieuses et tout qui vont vous tomber sur le dos pour vous empêcher de dire ce qu'ils font. On le fait et on ne doit pas en parler. Ça donne une mauvaise image de nos braves gens. Pensez! Une curé sérieux en train de jouer avec le pénis d'un petit garçons. Sérieux. Il vous vient des images dans la tête. En encore d'autres images quand vous pensez que c'est leur Dieu qui le demande. Un Dieu qui demande qu'on coupe les prépuces des garçons et les clitoris des filles. Un Dieu sérieux. Et tout et tout! Sérieux. Un être supérieur. Madame.
_ Vu comme ça, on ne sait plus vraiment.
_ C'est bien de ne plus savoir vraiment. Ça indique que la programmation a un bug.
_ Vous n'aimez pas qu'on utilise ces mots.
_ Mais si on tient à utiliser ce mot qui décrit quand même assez bien, oui, l'Homme est mauvais. Dangereux. Nuisible.
_ Je lis dans votre livre que si l'humanté disparaissait...
_ Ça n'aurait aucune importance
_ Mais vous mourriez aussi
_ Je n'accorde aucune importance à la vie. À ma vie. Et je n'ai pas peur de la mort. Alors...
_ Vous écrivez aussi que si c'est possible, il vaut mieux éviter les humains.
_ Je l'ai écrit. Je l'a dit. Si je l'ai écrit, c'est que je le pense.
_ Alors, pour vous, la garderie, l'école maternelle, l'école, ça a dû être l'Enfer.
_ J'ai appris très tôt à connaître... disons... mes frères humains. Si individuellement, ils sont dangereux. En groupe...
_ Et l'école
_ Je n'ai jamais été en prison mais ça peut arriver, les sociétés changent et souvent pas pour le mieux, mais ce que j'ai appris de ces différents milieux me fait dire que l'école est ce qui se rapproche le plus d'une prison. Ensuite, il y a les camps de concentration.
_ Les relations avec vos professeurs n'ont pas dû être tellement harmonieuse?
_ Comme je le disais tantôt, avec 50% des profs. Le reste n'était pas tellement... comme vous dites, harmonieux. Il y avait manque d'harmonie. Oui. On manquait d'harmonie.
_ Vous n'avez pas connu de pédophile, vous disiez
_ Par contre des malades mentaux, des fous, des sadiques, des pervers. On ne fait que parler de la pédophilie en référance aux abus d'un adulte envers un enfant, de certains ambus mais on fait comme s'il n'y en avait pas d'autres. Mais il y a tant et plus à part de la sexualité ou c'est une part tordue d'une sexualité perverse: l'abus de pouvoir, la violence, l'humiliation. Le rêve d'un sadique n'est pas de faire tout ce qui lui passe par la tête avec une femme sans défense. Mais avec un enfant. La différence de taille. Tout de suite. Vous pouvez le tuer d'un coup. Et le petit le sait. Vous faites durer le plaisir. Et il y a toutes sortes de raisons. En plus de la pulsion jouissive et irrésitible d'abuser de son pouvoir et de sa force. Il n'y a rien de pire pour un prof médiocre qu'un enfant intelligent. Il fera tout pour le détruire. Et on parle trop des professseurs. Parlons plutôt des adultes. J'ai appris très tôt à m'en méfier. Dangereux, stupides. À commencer par les parents. On oublie que la majorité des abus de toutes sortes sont le fait des pères et des mères. Sur les jeunes enfants avant qu'ils puisse se défendre. On parle de temps en temps des assassinats d'enfants par les parents, pères et mères, mais tous ne tuent pas mais beaucoup détruisent avec plaisir. Et pour en revenir aux pédo, à la sexualité qui n'est qu'une catégorie possible d'abus et d'exploitation: tout le monde cherche l'étranger. Mais les abus sont principalement le fait des pères et grands-pères. Sans oublier les mères. Complices. Ou participantes actives. Et les gardiennes d'enfants.
_ La mère ?
_ La plupart des femmes n'ont pas de libido. Mais elles cognent.
_ C'est terrible.
_ Elles peuvent hurler aussi. Pas besoin de cogner. La différence de poids encore. Et de cerveau. On peut détruire intellectuellement. Humilier. C'est plus lent mais ça ne laisse pas de traces visibles.
_ Donc pour vous l'école n'était pas tellement un endroit sécuritaire, un lieu de savoir
L'invité se mit à rire et ne parvenait plus à s'arrêter
_ Bon!
_ L'école prépare les futurs employés. L'horaire est quasiment calqué sur le travail de bureau. Le jour. La semaine de 5 jours. Des journées interminables dans des années qui n'en finissent plus à faire des trucs inutiles qui seront pourtant jugés sévèrement. Et impossible de se rebiffer. Il décide et juge. Vous obéissez. Il récompense et punit. Vous subissez. Et les relations profs et élèves sont celle du sous-chef avec ses travailleurs. Et comme tous les sous-chefs, ils tremblent devant la direction et se venge sur qui il peut se venger.
_ Et les autres enfants
_ De parfaits petits monstres. Sauf exception.
_ Mais les enfants sont charmants
_ Je n'ai jamais changé d'idée. Les enfants me donnent toujours envie de vomir.
_ Et les femmes?
_ Des usines à esclaves.
_ Vous y allez fort
_ Quand je vois une femme enceinte, j'ai l'impression qu'elle contient un gros abcès. Qui produira une fois abouti, l'infection terminée, la majorité des fois, des esclaves. Reproductrices d'esclaves. Et quelques prédateurs. Il faut beaucoup d'esclaves pour nourrir une prédateur. Comme dans tout écosystème.
_ Et l'amour?
_ Une manière de convaincre les gens inhibés qui n'auraient autrement aucune envie de s'accoupler. Dans la plupart des sociétés, on se passe très bien d'amour. On décide dès la naissance qui sera accouplé à qui. Comme il n'y a pas aujourd'hui, ici, ces obligations, on utilise des moyens détournés. Dans le même but. Renouveler la force de travail. Et de contremaîtres et de sous-chefs et de patrons.
_ Et la liberté?
_ Une autre illusion. Comme si les animaux étaient libres. La Nature décide. Ou c'est la société. Rarement, soi. Tout est prévu. Vous êtes jeunes et si vous êtes énergiques, la progammation fonctionne. Comme tout ce qui vit. L'attirance pour le sexe opposé. Ou le même sexe. 9 mois après, bébé. Mais la société et les gens respectables vont dire: tu n'y penses pas. Tu es trop jeune. Coucher avec cette fille pauvre, ce moins que rien. Non qu'ils n'aient aucune envie que leurs rejetons couche jamais ou avec personne mais il faut coucher utile. Au bon momen. Quand ils auront jugé que. La jeune vierge ne doit pas se laisser pénétrer par un pauvre. Arrive un jour, où dit qu'on a assez attendu. C'est le moment. Il faut qu'elle se laisse pénétrer. Mais avec des cérémonies. 9 mois après. Naissance du petit bourgeois.
_ Vous n'aimez pas tellement les femmes.
_ Un homme avec un vagin. Contrairement aux escargots, les humains ont des sexes définis. La Nature en a décidé ainsi. Conçus pour la reproduction. 20 ans d'emmerdement si le condom ne fonctionne pas ou si elle a fait semblant d'avaler sa pilule. Et les femmes se pâment. Oh! Le jolie bébé. Ça fait parti de leur programmation. Comme toutes les femelles de toutes les espèces. Dans le meilleur des cas. Car les femmes tuent aussi. Et même si elles est inoffensive, personne ne pense que le joli bébé vous empêchera des dormir pendant 2 ans. Chiera sa tonne de merde. Deviendra un ado désabréable et aura 50 ans un jour. Quand je vois un bébé, je vois un comptable.
_ Si je vois ce que vous dites de la femme et de l'amour, vous ne devez pas être marié ou vivre en couple. Si vous êtes logique.
_ On n'est jamais seul. Il y a trop de gens partout.
_ Et si vous ressentez certains besoins.
_ Comme je suis contre l'exploitation des gens, je ne paie pas de prostituée. Même si je n'ai rien à dire contre leur métier. Elles servent de soupape de sécurité à bien des hommes qui seraient autrement bien dangereux. On devrait les valoriser plus. Et les payer plus cher. Étant donné leur utilité sociale. Leur donner des médailles. Tous les jours, elles risquent leur peau. Et à bien y penser, il n'y a rien de mieux que la masturbation.
_ Vous devez vous sentir bien seul. Je vous plaint
_ Dans la forêt, est-ce qu'on se sent seul? Il y a des animaux. Pareil en ville. Le jour. Et allez faire un tour, la nuit, dans certains quartiers. Vous allez vite découvrir les joies tranquilles et paisibles de la solitude. Si vous vous en sortez vivants.
_ Et le bonheur? J'ai presque peur de votre réponse.
_ Illusion. Sous catégorie de l'illusion. Illusion féminine. Comme l'amour. Sujets éternels des revues de femmes. Entre 2 annonces de régime et poudres et crèmes et lotions de perlimpimpin amstramgram pour la peau.
_ Je n'aime pas utiliser le mot complot mais...
_ Il n'y a pas de mais. Comme on attend beaucoup des femmes, indispensables pour la reproduction de l'espèce: travailleurs, soldats, gardiens de prison, avocats, comptables, et que c'est épuisant et qu'elles peuvent en crever et qu'elles pourraient finalement dire qu'elles n'en ont plus vraiment envie. Et qu'il n'y a pas de machine qui peuvent les remplacer pour le moment même si ça viendra un jour. Même si comme toutes les petites femelles elles sont programmées pour. On ne prend pas de chance. on leur bourre la tête dès le plus jeune âge de toute sorte de conneries. Les petites princesses. Le prince charmant. Mais le prince est toujours charmant et n'a pas d'érection.
_ J'ose à peine vous demander si pour vous la vie a un sens?
_ Le même sens que pour toutes les espèces vivantes. Vivre. Mourir. Vivre. Bouffer. Chier. Mourir. Se décomposer.
_ Et, pour vous, c'est le seul sens de la vie. Tout le monde se dirige vers son tombeau.
_ C'est le seul sens. Droit devant. Ou, plutôt, sens vertical. On creuse. Tout en bas. 6 pieds. Ou on vous brûle au gaz. Ce qui vous évite de temps de la décomposition et du compost. Vous êtes déshydratés et réduit en poudre ce qui prend moins de place.
_ Mais un sens... je veux dire: le sens de la vie. Un idéal. Des valeurs.
_ La vie n'a pas de sens. Si vous utilisez ces mots-là. Mais est-ce que la grenouille a besoin d'avoir autant de sens pour sa petite vie. L'abeille dure 34 jours. L'éphémère ne vit qu'1 jour. 24 heures. Par humour, la Nature lui a donné une bouche mais pas de tube digestif. Il ne peut se nourrir mais n'en a pas besoin. Son unique but, le sens de sa vie est de se repruire et de servir de nourriture à ses prédateurs. Pourtant l'espèce est là depuis 350 millions d'années.
_ Et on attend de mourir.
_ Pas besoin d'attendre.
_ Vous n'allez certainement pas contribuer à la campagne contre le suicide.
_ Certainement pas. Je suis pour le suicide. La mort est la seule liberté que l'on a. À partir du moment où on naît, on cesse d'être libre. Exister est donc la première calamité. Homme ou femme, déjà la vie est décidée, déviée. Riche ou pauvre. Encore une autre déviation. Intelligent ou non. Malade ou en santé. Dépressif ou non. On décide très peu de notre vie. Et de toute façon, tous les chemins mênent à la mort. Je comprend très bien que quelqu'un qui en a assez se dise...
_ Mais les suicidaires qui nous écoutent, vous leur conseillez quoi? D'aller se jeter au bout du pont?
_ Vous savez que ce genre de conseil est interdit. Si je dis qu'on n'est pas libre, on peut l'être encore moins. La société et les Hommes peuvent vous faire souffrir bien plus que vous l'imaginez.
_ Que l'on dise que les Hommes sont libres ou pas
_ C'est à chacun de faire ses choix. Si encore une fois, on peut réellement choisir. Tant mieux si on le croit.
_ Et pour vous la mort volontaire est un choix.
_ Oui.
Monsieur Dickson s'était endormi sur le perron, son chat revenu dont on ne sait où. Ou, peut-être du royaume des morts dont ont dit que les chats sont les messagers et les intermédiaires. Son chat ou est-ce qu'un chat est à quelqu'un? Disons, le chat, sur ses cuisses. Dormant tous les 2.
*
28. 30 juillet 2012. État 2
Il y a des gens qui font des sudokus, du scrabble, des mots croisés ou participent à des pools de hockey pour se désennuyer. Je bois mon thé et je fais un quart d'heure de géopolitique. Et, en attendant la prochaine guerre mondiale - aujourd'hui, mardi 3 février 2015, il n'y a pas encore de guerre mondiale - j'écris des histoires de fantômes.
HISTOIRES DE FANTÔMES
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Vers minuit, à la lueur de la chandelle, monsieur Henry Dickson, devant l'âtre où brûle des bûches d'érables et de vieux parchemins, se penche sur son écritoire. Tout est tranquille dans la grande maison, tout semble dormir et, soudain,
il y a ce bruit.
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