HISTOIRES DE FANTÔMES

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HISTOIRES DE FANTÔMES.

Vers minuit, à la lueur de la chandelle, monsieur Henry Dickson, devant l'âtre où brûle des bûches d'érables et de vieux parchemins, se penche sur son écritoire. Tout est tranquille dans la grande maison, tout semble dormir et, soudain,
il y a ce bruit.

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1.1.13

320.16. AU COMMENCEMENT C'EST TOUJOURS LA NUIT

Henry Dickson n'était pas là.

Encore.

Il n'était pas là le premier janvier.

Il n'y était pas le 31 décembre. Le jour du 31 décembre 2012, dernière journée de l'année. Ni à minuit, à l'arrivée de la nouvelle année. 2013. Lorsque tout le monde s'embrasse. La petite blonde avait embrassé tout le monde, salué la nouvelle année à tout le monde comme elle avait dit Joyeux Noël à tout le monde, le 24, à la messe de munuit, et le 25 jour de Noël.

Il y avait plein de monde dans la maison.

Sauf lui.

Il ne tenait pas à voir ses amis ou ses parents. Ou ne tenait pas à se faire de nouveaux amis. Ou cette partie de la vie de la petite blonde ne l'intéressait pas. Chacun sa vie. Comme il ne lui parlait jamais de la sienne. De ses voyages courts ou long. Où il allait. Qui il voyait. C'était sa vie. Et ce n'est parce qu'il partageait le même corps, le sien, qu'il partagerait son esprit.

Elle avait compris. Elle avait compris tout ça. Elle comprenait tout. Parce qu'elle était intelligente. Et c'est le rôle des gens intelligents de comprendre.

Elle avait essayé de savoir s'il l'aimait. Il avait répondu que c'était un sentiment féminin. Il était content qu'elle l'aime, pour le temps que ça dure. Lui, était bien avec elle. Quoi demander de plus. C'était aussi un sentiment d'ado. Alors qu'on est à la fois plein d'hormones et d'émotions. Un truc de la nature pour que les nouvelles générations fassent des bébés. Et la pire catastrophe qui peut arriver avec l'amour ou le sexe, c'est un enfant. Il y en a bien assez comme ça.

Elle avait essayé d'argumenter, de trouver les mots. Il lui avait dit qu'il ne tenait plus à la vie depuis longtemps et qu'un jour il ne serait plus là. Elle faisait donc une erreur de s'attacher ou de planifier des projets à longs termes. Elle ne serait qu'une veuve de plus sur laquelle s'apitoyeront les gens.

Elle pensait qu'il blaguait. Il blaguait souvent. Il n'avait vraiment pas l'air de quelqu'un qui pense à la mort tout le temps. Mais il n'y pensait pas tout le temps, lui avait-il répondu. C'est que la plupart des gens n'y pensent jamais et quand ça arrive c'est comme une surprise alors que dès la naissance, ils doivent une mort et son condamnés. Mais il y a des gens qui sont déjà de l'autre côté depuis longtemps, qui voyagent d'un monde à l'autre ou ont un pied de chaque côté. Prêt à partir. Comme les voyageurs professionnels qui ne s'encombrent de rien et dont la valise est toujours prête. Ils vivent comme tout le monde. Avec des tiroirs et des armoires. Du linge habituel. Et pour ne rien chercher au moment du départ, une valise fermée. Où tout y est.

Elle pensait toujours qu'il plaisantait.

Jusqu'à ce qu'ils fassent un voyage à Montréal. Ils rentraient à leur hôtel en prenant un raccourcis et rencontrèrent un fou drogué armé qui ne savait pas ce qu'il voulait sauf les tuer. C'était la première fois qu'elle se retrouvait face à une arme et avait figé. Lui regardait l'autre. Comme il le lui avait expliqué plus tard, la distance était trop grande pour faire quoi que ce soit. Tout ce qui pouvait arriver était qu'il sursaute et tire n'importe où et blesse l'un et l'autre gravement. Il valait donc mieux attendre que ça se termine, comme lorsqu'on est dans le bureau d'un médecin ou dans la salle de montre d'un salon funéraire à choisir le cercueil d'un parent. Il lui avait déjà dit qu'il était tout à fait indifférent à sa mort et elle lui avait dit autant de fois qu'elle ne le croyait pas.

Le fou tira. La balle entra dans le bras de monsieur Dickson. Se rendant compte qu'il avait en face de lui un maladroit qui ne pouvait que faire des dégâts, il avança très vite, ce qui surpris le fou. Et le fou mourut avant même de penser tirer un second coup.

Elle l'avait vu tuer le fou aussi facilement que l'on tue les poules au village. On les prend par le cou et on les fait tourner au bout de leur coup comme une manivelle. Cou cassé. Ce qui était arrivé au fou mais différamment. Coup cassé tout de même. Fou mort.

Ils étaient allé à la pharmacie la plus proche et avait pris ce qu'il fallait. À l'hôtel, elle le vit retirer la balle de son bras avec une pince à cil désinfectée à l'alcool. Comme elle voulait participer, il lui permis de jouer à l'infirmière avec les bandages et les ciseaux. Et la couture car elle cousait très bien.

Comme il le disait souvent: il cicatrisait très vite.

Pendant qu'elle le cousait à froid, elle s'était demandée si elle devait s'excuser pour s'être cachée derrière lui. Il était plus grand et plus large qu'elle. Et elle avait eu peur de souffrir. Il ne parla pas du sujet. Ne fit aucune blaque grinçante car il lui arrivait d'être sarcastique. Et elle n'en parla pas. Et avait oublié jusqu'à ce qu'elle se souvienne.

Elle se souvenait.

Elle avait froid. Elle avait toujours froid lorsqu'il n'était pas là.

Il était peut-être mort. Le moment de sa mort était peut être arrivé. Elle le savait. Il ne lui dirait rien. Il saurait quand c'est le temps.

Il ne voulait pas d'annonces dans les journaux. De services funèbres. De messe. D'exposition du corps au salon funéraire. De cercueil. De lot au cimetière. On le brûlerait. Et on jetterait ses cendres aux toilettes ou à tout autre endroit disponible. Le tas de compost de la maison par exemple.

Et plus personne ne parlerait de lui.

Cet endroit, le monde, ne l'ayant jamais vraiment intéressé. Pas assez pour s'éterniser.

Elle avait envie de pleurer.

C'était une femme et il leur arrive souvent d'avoir envie de pleurer.

Elle se souvint que tout à l'heure, elle était fâchée ou sur le point de l'être. Que tous les astres s'alignaient pour qu'elle soit fâchée et puis ça avait dérapé et elle avait envie de pleurer. Ou d'être triste. Mélancolique.

La plupart des gens le sont à la fin de l'année passé et c'est pour ça qu'ils font vite des résolutions pour l'année à venir. Cette fois, ils feront ce qu'ils auraient dû faire et éviteront de faire ce qu'ils ont fait. Et chaque année, ça recommence.

Et c'est l'année nouvelle qui l'inquiétait maintenant.

2013.

Tout une année avec le chiffre 13. Déjà qu'en temps normal, on se méfie des vendredi et il n'y en a 5 par an.

Il n'était pas là.

Il était peut-être mort quelque part. Il lui avait dit qu'il était plus simple de «disparaître» plutôt que d'encombrer les gens avec un corps encombrant.

Il était peut-être mort sans qu'elle le sache. Et il se pouvait que ce soit la dernière fois qu'elle l'avait vu sans qu'elle lui ait dit bonjour ou au revoir comme il fallait. Mais comment dire bonjour et au revoir à quelqu'un qui va mourir. Qui est ou semble en parfaite santé qui n'est pas vieux ni malade ni sur un lit d'hôpital ou de foyer, comme on dit, de personne âgée, comme on dit. Le foyer du bonheur ou le château du repos ou villa de la mer calme quand il n'y a pas de mer juste des gens qui meurent très lentement.

Des sentiments contradictoires et compliqués. Subtils. Contradictoires. Comme une rectte de cuisine Asiatique.

Elle recommençait à être de mauvaise humeur. Et que c'en était la cause.

Parce qu'elle était seule.

Ou avait trop d'émotions refoulées pour son petit corps.

Et elle n'avait pas l'expérience des femmes plus vieilles qui sont habituées d'être malheureuses parce qu'elles le sont depuis si longtemps.

Elle regarda le feu dans le foyer.

Le feu qui ne le réchauffait plus.

Le feu sur la plaque de fonte au fondu du foyer, derrière le chenet de fer et de bronze plein de bûches. Les dessins moulés, gravés, sculptés dans la fonte. Et qui dansaient.

Les lumières du plafond se mirent à danser. Clignoter. Comme lorsqu'on est sur le point d'avoir une autre panne de courant.

Il y avait une boule de verre sur la table du salon. Qui luisait. Renfermait les lueurs du feu dans son verre.

Et qui explosa.

Il fallait qu'elle fasse attention.

Elle savait qu'elle n'était pas normale. Pas comme les autres. Pas seulement parce qu'elle était très intelligente, ce qui était déjà rare statistiquement. Parce qu'elle lisait tout et retenait tout et savait beaucoup plus de choses que les gens qui ne lisaient rien ou presque. Mais parce que. Les vieilles lui avaient dit. Elles lui avait dit de faire attention. Il ne fallait pas attirer l'attention sur elle. Parce qu'elle attirerait aussi l'attention sur elles aussi. Et c'étaient dangereux. Parce qu'elles n'existaient pas. Et si, soudainement, comme dans les siècles passés, on se mettait à s'apercevoir qu'elles existent, elles étaient en danger. Heureusement, dans une époque sans foi ni religion ou on croit à peine, il est possible de passer inaperçu. Car on prendra pour un caprice ou une fantaisie ou une maladie, au pire, ce qui, ailleurs, il y a longtemps, en fait, pas si longtemps, vous aurait conduit au bûcher.

Les débrits de la lourde boule de verre volaient au-dessus de la table comme s'ils étaient en orbite autour de. De quoi au juste. Comme s'ils étaient libérés enfin de la pesanteur qui les écrasait.

La boule de verre. Les poussières du verre, le feu de foyer, le chenet forgé de fer et de bronze dont les éléments se séparaient et serpentaient dans le feu et autre chose.

Elle perdit conscience.

Ou entra en transe.

C'était l'été.

Montréal encore.

Elle était en retard.

Elle devait amener des photocopies à distribuer aux passants et aux spectateurs qui se trouveraient sur les trottoirs le long de la manifestation, le but de leur action.

Elle était en retard.

Connaissait mal la ville.

Pris un raccourcis. Une ruelle.

Elle aurait dû se méfier.

Il y avait 3 hommes, du militaires qui passaient ou allaient passer, devant elle. Elle eut un mauvais pressentiment. Les vieilles lui avaient dit que les hommes sont capables de tout. Elle se fit donc toute petite, ce qui était facile, rasant le mur qui toucha son épaule gauche, pour leur donner tout l'espace. Le reste de la ruelle puisqu'il n'y avait pas de trottoir.

L'un plissa la lèvre comme pour faire un sourire de convenance. Un autre sembla cligner d'un oeil.

Elle arriva à leur côté et ils s'écartèrent d'elle comme il était convenable dans une société civilisée. Ou on laisse l'espace à la femme.

Ceci se passa très vite.

En un instant, au moment où leurs marches se croisaient, elle se sentit pousser contre le mur. Qu'elle frappa de son épaule gauche. Ce qui lui fit mal. Elle se sentit aussitôt prise par de fortes mains aux 2 épaules et on la poussa rudement verst le mur où elle entra en pleine face. Ce qui l'étourdit.

L'instant suivant, elle se retrouva la tête et le cou pris sous l'épaule d'un homme. Comme les français porte leur pain baguette dans les vieux films ou comme les lutteurs font avec leur adversaire avant de le précipiter vers le poteau où ils l'assommeront avec leur propre tête. Mais ce n'est pas ce qui se passa.

On l'immobilisa tout simplement. Il lui était impossible de bouger et de respirer. Il suffisait à l'homme de presser le bras pour lui écraser les oreilles ou le cou. Ou la machoîre. Impossible de crier et d'appeler.

Elle se trouvait donc pliée. Le dos droit à 90o . Comme une table. Donc le corps penché. Les jambes droites. On avait amené sa tête vers le mur, comme on ferait pour du bétail, elle ne savait pas parce qu'elle ne voyait pas ce qu'on faisait dans son dos ou ce qu'on voulait faire ou ce qu'on ferait.

Si sa tête regardait le mur entre 2 respirations, ses jambes et ses fesses étaient côté à la ruelle et face à eux.

Elle les sentit essayer de défaire sa ceinture ou tirer son pantalon. Il y avait beaucoup de mains.

Elle fit donc ce que lui avait dit monsieur Dickson. Puisque ses mains étaient libres, une erreur de leur part. Une erreur parmis d'autres. Comme la première, la pire de toute, celle de s'être trouvé là et de vouloir lui faire. Lu faire. Lui faire. Elle n'arrivait pas à penser le mot. À le conceptualiser.

Elle n'en revenait pas. En 2012, au deuxième millénaire, qu'on en soit encore là. Que ça ne se passe pas dans quelques coins reculés de la planète au milieu de primitifs mais ici, maintenant, dans sa ville, ou presque, alors qu'elle voulait aider les gens, la paix dans le monde, tout ça. Est-ce qu'elle méritait une telle chose. Qu'est-ce qu'elle avait fait pour avoir un tel sort? Sauf être une femme.

Elle agrippa donc le petit doigt de la grosse main du gros bras qui retenait sa gorge et sa tête et le vira à l'envers. Pas seulement à 90o mais à 180. Ce qui fit clic dans l'articulation. Et ce qui fit aussi très mal. À en juger par le son qui sortit aussitôt de la bouche ou de la tête de l'homme qui était au-dessus de lui et qu'elle ne voyait pas. Par contre, ceci ne lui fait aucun mal à elle. Sauf une petite joie.

Le choc fut rude. La douleur intense. La surprise soudaine fit que l'home qui l'immobilisait comme dans un éteau la libéra. Tout ce qu'il pensait à faire était de tenir sa pauvre main et regarder son pauvre doigt tout retourné vers le dos de la main et qui ensuite se mit à pendre.

Entre 2 hurlements, il l'insultait.

Ses 2 amis furent surpris. Se moquèrent d'abord de lui. Se faire surprendre ainsi par une femme. Combien de fois, ils avaient fait ainsi contre des Afghanes et mêmes des femmes soldates - jamais de leur unité, au cas où ça se surait- et jamais une chose semblable ne s'était passé.

Comme s'ils voulaient la calmer mais c'était une très mauvaise façon, les 2 autres hommes se dirigeaient vers elle en l'insultant. Lui disant que puisqu'elle faisait la vilaine, ce serait de sa faute si ça ne se passait pas gentiment. Elle les sentirait passer et ça lui ferait très mal.

À ce moment, elle était furieuse.

Elle aurait pu profiter de la première surprise pour s'enfuir. Elle avait des espadrilles roses Converse qui couraient très bien mais ils étaient jeunes, des hommes en forme, et courraient plus vite qu'elle. Elle avait donc arrêter de penser à s'enfuir.

Parce qu'elle était furieuse.

Elle n'avait jamais été aussi furieuse de sa vie.

Et jamais quelqu'un ne l'avait vu aussi enragée.

Elle fit donc quelque chose d'intattendu qui les frappa de stupéfaction avant de les faire crouler de rire tant c'était aburde, inattendu, stupide. Aucune des nombreuses femmes qu'ils avaient violées sur tous les théâtres d'opérations où ils avaient manoeuvrés avec leur unité, sans compter les Philippines où était le bordel national de l'armée Canadienne où allaient les hommes en permission, là où on trouvait tout ce qui peut satisfaire le soldat, y compris des enfants, petites filles ou garçons, vendus par leurs parents afin de permettre à ce qui restait de la famille de survivre, comme on faisait depuis des millénaires. Il n'avait jamais vu ça.

Et c'est la dernière chose qu'ils virent avant de commencer à ressentir des choses déplaisantes. Vraiment très déplaisantes. Il est vraiment difficile de dire ou de décrire comment ce pouvait être déplaisant.

Les 3 hommes commencèrent à haleter, raler, à se tenir le ventre. Leurs ventres gargouillaient. Comme s'il s'y passait des choses, disons, déplaisantes.

Ils commencèrent à pisser dans leur pantalon.

Sans pouvoir se retenir.

Regardant leurs jambes et ce qui sortait sur leurs bottes en flot, faisant une flotte sur l'asphalte. Pas très grande ou assez grande mais pas énorme.

Quelque chose se passait dans leur oreille interne qui leur donnait le vertige. La rue, le ciel, le monde, les murs  tout tournait autour d'eux. Il leur était impossible de se tenir debout, ou assis, à à 4 pattes. Ils flottaient dans un monde aérien sans haut ni bas ni droite ni gauche.

Puis encore leurs ventres.

Cette fois, ce fut si violent que chacun se serra la poitrine. Et ils se mirent à chier. Une diarrhée liquide et puante qui ne cessait pas. Et qui leur tordait le ventre, les jetait par terre, emplissait leurs pantalons et coulait comme la pisse dans leur jambes, le long de leurs bottes. La ruelle sentait la porcherie.

Heureusement qu'ils étaient déjà à 4 pattes, car les douleurs qui leur serrraient le ventre et les côtes recmmencèrent et ils se mirent à vomir.

La bile et le vomi furent projeté droit comme l'eau sortant du boyer d'arrosage d'un pompier, comme une trompe d'éléphant, plusieurs pieds devant eu.

Vomissant par en avant et chiant par en arrière.

Tout ce qu'ils avaient mangé depuis des jours. Tout ce qu'ils avaient bu.

Jusqu'à ce qu'ils vomissent du sang, pissent du sang, chient du sang.

Jusqu'à ce qu'ils se vident comme des sacs.

Râlant parce qu'ils ne pouvaient plus vomir car il n'y avait plus rien mais leur bouche voulaient encore vomir.

Et les muscles de leurs poitrines serraient comme des doigts presssant un tube de dentifrice pour faire sortir ce qui restait de pâte à dents afin de ne pas gaspiller.

Et les muscles de ces hommes entraînés au combat, ces pectoraux et abdomiaux puissants brisèrent leurs côtes et leurs vertèbres une à une.

Et chacun criaient comme on n'a jamais entendu des gens crier. Et personne ne les entendait.

Et ils moururent comme des chiens. Pire que des chiens. Tout ce qu'ils méritaient.

Puant la pisse, la morve, la bave, le vomi, la merde.

Arriva 2 autres soldats. Des soldats tout contents.

Des voix sans corps répercutées par l'échos des murs de briques.

_ Tabarnac! J'ai jamais entendu une plotte chialer comme ça. Laissez-en un peu pour nous!

Et sortirent de leurs ruelles pour arriver à l'autre. Virent les 3 soldats à terre. Presque plats comme des guenilles sales et puantes.

Ils virent la femme qui regardait satisfaite. Sans comprendre ni se poser des questions - on les avait entraîné pendant des mois puis des années à ne jamais faire cette erreur- ils foncèrent.

Et la petite blonde siffla.

Quelque chose se passa dans leur tête.

On pourrait appeler ça un caillot sanguin qui bloque un veine du cerveau et le fait exploser. Ceci sera évidamment plus clair lors de l'autopsie qui suivra.

Ils cessèrent de voir à l'instant.

Ils furent paralysés l'instant d'après. Un instant. Mais ce fut si vite. Ils tombèrent tous les 2 à terre.

Et les yeux, le globe oculaire qui est l'extension du cerveau hors de la boite crânienne ou les yeux qui vont directement de l'air du monde à l'intérieur du crâne et du cerveau se voilèrent de rouge et de noir. Le sang coula sur l'oeil et dans l'oeil maculant l'iris et la cornée. Les 2 soldats avaient dorénavant des yeux rouges puis noirs. Ils étaient aveugles.

Et les yeux explosèrent.

La sang et le liquide coula, une eau comme un blanc d'oeuf mêlé de sang. Coula sur leurs joues, leurs bouches, ils burent leurs yeux.

Et le cerveau coula dans le trou enfin libéré. Leur cerveau liquéfié.

Leurs coeurs battaient encore à ce moment. Et à l'hôpital où on amena ces 2 corps sans cerveau, les coeurs continuèrent à battre. Impossible de parler, de bouger, de respirer, de manger seul. Mais vivant. Vivants aussi longtemps qu'on ne débrancherait pas la machine qui les gardait en vie.

La petite blonde était maintenant sans force. Elle n'avait jamais cru qu'elle pouvait faire tant de choses merveilleuses et incompréhensibles.

Elle ramassa la pile de feuilles qui était tombée à terre. Les journalistes étaient si excités que s'ils trouvaient une de ces feuilles, ils étaient capables d'inventer un lien entre les manifestants et ce déplorable incident.

En s'en allant, elle tourna la tête pour regarder une dernière fois son oeuvre et en fut profondément satisfaite. Ces monstres ne méritaient pas de vivre. Et ce jour-là, ils venaient de rencontrer leur destin.

Ainsi va la vie.

Parfois.

Les journalistes et la police et l'armée se posèrent bien des questions au sujet de ce drame horrible qui avait fauchée la vie de 5 héros dont 2 à jamais handicapés physiques et mentaux - ils n'avaient plus de cerveau.

Un spéciliste consulté amena plusieurs possibilités intéressantes dont une qui le passionnait beaucoup: le virus d'ébola. Mais seuls des analyses en laboratoires permettraient de se faire une idée.

Arrivèrent des techniciens en costumes de haute sécurité qui amenèrent les policiers, les ambulanciers et les journalistes dans le seul centre du pays où on pouvait les garder en quarantaine. Il n'y avait aucun moyen de guérir cette infestation. Des échantillons de sang permettraient de voir plus clair. Ensuite, si c'était cette contagion, on ne pouvait qu'attendre leur décès dans des douleurs atroces qu'on essayeraient d'atténuer autant que possible.

Les 5 soldats étaient en permission et venaient d'arriver d'Afghanistan. Médaillés et tout. Le sort était injuste. Passer 3 mois sans être atteint par une balle ou une bombe et périr victime d'un mécanisme vital invisible et infinitésimal. Et incompréhensible.

S'il y avait une épidémie là-bas, la mission risquait d'être compromise. 1 milliard par an depuis 10 ans pour rien. Ce qui paraîtra beaucoup pour les esprits grincheux mais on leur rappellera que les USA, c'était 1 milliard par mois. Et personne là-bas ne se plaint.

Il faudrait évacuer les soldats mais on ne pouvait les rapatrier s'ils étaient eux-aussi atteints. On les placerait en confinement le temps de voir plus clair. Généralement, les effets de la maladie sont très rapide et évident et on voit clair assez rapidement. Quant à la population locale atteinte, ce ne serait qu'un problème de plus et au point où elle était.

L'ONU enverrait sans doute une de ses agences pour faire ce qu'elle pouvait. Comme d'habitude, pas grand chose.

Les journaux titrèrent: MORTS DE HÉROS.

Assise dans le salon de la grande maison, devant le grand feu du grand foyer enflammé, elle revint à elle.

Le glove de verre qui flottait au dessus de la table, se décomposant et se recomposant périodiquement, se désagrégea enfin et tomba en poussières comme du sel sur la table.

Elle s'aperçut qu'elle avait le cul mouillé et que c'était du sang. Elle se sentait bien. Vide. Plus aucune pression. Libéré d'un poids.

Sauf que sa culotte dans sa robe et sa robe sur ses fesses était sanglante et le coussin aussi.

Et le tampon dans son vagin était bien gonflé.

Elle pensa qu'il fallait qu'elle change de sorte de tampons, ceux-ci n'étaient vraiment pas fiables.

Le sang coulait sur ses jambes.

Un des coussins du divan était foutu.

Il faudrait qu'elle téléphone au rembourreur pour en faire faire un autre avant que monsieur Dickson rentre car il allait revenir et ne serait pas mort.

Et elle serait contente de le revoir.

Car elle ne lui en voulait plus.

Tout irait pour le mieux.

Et elle avait enfin cessé d'avoir mal au ventre.

Les femmes sont bien compliquées.

*

1 janvier 2013. État 1

Morts. 5


*

Note.

Vous lisez présentement le second cycle des histoires de fantômes. Ou second roman.


Le premier cycle ou premier roman s'étant terminé au numéro 301.


Le nouveau a recommencé au numéro 305.1.

Le .1 pour le premier chapitre.

En attendant d'être publié sur un autre blog, ce qui permettrait de repartir à zéro ou 1; on continue la numérotation mais en ajoutant un chiffre après un point pour préciser.


On est donc, ici, au chapitre 16, de la suite des histoires palpitantes d'Henry Dickson. 
Soit 320.16

Et bonne lecture.

Faîtes de beaux rêves.