HISTOIRES DE FANTÔMES

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HISTOIRES DE FANTÔMES.

Vers minuit, à la lueur de la chandelle, monsieur Henry Dickson, devant l'âtre où brûle des bûches d'érables et de vieux parchemins, se penche sur son écritoire. Tout est tranquille dans la grande maison, tout semble dormir et, soudain,
il y a ce bruit.

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23.11.13

443.140.47. MADEMOISELLE LA SECRÉTAIRE EST EN CE MOMENT DANS UNE SITUATION PÉRILLEUSE ET RIEN NE DIT QUE LES CHOSES S'ARRANGERONT POUR LE MIEUX DANS UN FUTUR PRÉVISIBLE

La situation était la suivante.

Le mur ouvert grâce à un mécanisme providentiel et mystérieux. 

Une sorte d'antichambre menant à 2 tunnels qu'on devinait sans pouvoir savoir leur destination. À moins de s'y trouver. 

Il fallait choisir car si on prenait l'un, on ne prenait pas l'autre. Ce qui est d'une admirable logique.

Car l'espace qui les reliait l'un à l'autre et aux salles du musée de la sorcellerie qui était une sorte de centrale d'énergie mystique destinée à un usage mystérieux - comme la courte barre verticale d'un T était non seulement le lieu de passage vers la liberté mais aussi vers la mort. Une mort atroce.

Sous le plancher de cette petite salle, il y avait des instruments de mort destiné à rendre celle-ci lente et pénible. 

Les amateurs d'antique se souviendront du supplice de la légion romaine convertie au christianisme et que l'on a mis en demeure de renoncer à la vraie foi pour retourner au culte de l'empereur divin. Pire, ils s'étaient fait baptiser. D'ordinaire, lorsque le crime était grave, on procédait à la décimation du régiment. Mot qui a pris depuis un sens plus grave qu'à l'origine alors  qu'il consistait à crucifier un soldat sur 10 pour donner une leçon aux autres. On espérait ainsi que les 9 autres comprendraient la leçon. Ce qui aurait été plus difficile si on les avait tous tué. Donc, le régiment (on ne sait pas le nombre exact) refusa l'offre miséricordieuse qu'on lui faisait et préféra périr. Ce qui fut fait. On les amena tout en haut d'une montagne, près du bord d'un précipice où on leur ordonna de se jeter dans le vide. Tout en bas, on avait installé une forêt de pieux pointus en bois, des lances pointés vers le ciel et des chevaux de frise. Ils s'y jetèrent tous en priant. Le supplice dura tout le reste de la nuit pour les moins chanceux. Car les corps s'embrochèrent les uns après les autres et, parfois, les uns sur les autres. Les pointes traversant les ventres, les têtes, les cages thoraciques. Certains furent empalés comme on le fait chez les asiatiques. D'autres, arrivant têtes premières, furent pénétrés par les tête comme des vers de terre sur un hameçon. Les uns moururent sur le coup. Les autres au bout de leur sang. Tous prièrent le Ciel de les recevoir. Et quelques-uns chantèrent des hymnes. L'Église depuis ce temps les considère comme des martyrs et des saints. 

Sous le plancher de l'antichambre des  tunnels, il y avait tout un réseau de longues pointse de fer bien planté à la verticale. Et sur les 4 murs des lames horizontales destinées à la boucherie des corps plongeant vers l'abîme. Avant qu'ils ne s'empalent inexorablement. 

Mais ce qui était presque plus cruel que cette vision de cauchemar était le fait qu'on ne voyait rien. 

Au moment où se passent cet incident, le plancher qu'un mécanisme ingénieux et savant fait basculer - ce qui avait permis de connaître les secrets de ses entrailles - était revenu à sa position factice initiale. C'aurait pu être un de ces sol en apparence inerte mais qui cache en réalité un sable mouvant mortel. Si on ne voyait plus à ce moment les pieux de fer et les lames - cachés par le plancher - on les avait pourtant gardé en mémoire - et c'est comme si on les voyait - comme si on ne voyait qu'eux. 

Donc, en apparence, la scène aurait pu être risible. Une paire de planches vernies posées sur un plancher de bois et sur ces planches posées de travers, passait péniblement une femme visiblement inquiète et qui ne cessait de regarder ses pas. Ses mains et ses bras étaient à l'horizontale comme elle avait vu faire dans les cirques itinérants des Romanichels qui enlèvent les enfants innocents pour en faire des esclaves et les dresser pour leur cirque monstrueux. Elle marchait donc en équilibre instable sur les planches posées sur un plancher en apparence tout à fait inoffensif d'où l'humour de la situation destiné aux ignorants. Car ceux qui savaient - et elle en particulier - connaissant les périls qui l'environnaient. 

Elle hésitait donc.

Mais son hésitation ralentissait sa marche alors qu'il aurait fallu aller gaillardement et en quelques pas, on était passé de l'autre côté. Mais à ce rythme, on n'y arrivait pas. Elle paraissait même ralentir. Ne cessant de regarder ses chaussures, les planches, le plancher muet et secret et comme si elle voyait au travers des surface, le piège monstrueux qui lui était destiné.

Finalement, elle s'arrêta net au milieu du trajet incapable d'avancer davantage.

Il est connu que les femmes sont faibles, peu fiables. Et on voit bien à raison. Et tragique est le sort de l'homme qui se sera étourdiment fié à une de ces créatures.

Cette situation de fait était fort embarrassante pour nos 2 héros. Ils étaient réticents à passer au dessus de l'obstacle invisible mais la marche de mademoiselle la secrétaire leur avait montré que ce n'était pas impossible - que si une faible femme réussissait comme cette aventure serait presque facile pour des hommes. 

Les pieds leur frétillaient. 

Ils avaient envie d'avancer à leur tour.

Mais avec mademoiselle la secrétaire au milieu du sentier suspendu de planches, cela leur était désormais impossible. 

À quelque chose, malheur est bon, comme dit le proverbe. 

Mademoiselle la secrétaire avait rempli son rôle historique. On avait pensé la sacrifier à la science. Mais elle avait tenu bon. Maintenant, elle s'entêtait et constituait un obstacle. 

Car les planches étaient sûres. Le plan était bon. Il fallait passer, il suffirait de passer. Et on laisserait le pire derrière soi. 

Malheureusement, elle ne bougeait plus. Ne pouvait plus avancer ni reculer. 

Elle pouvait tomber de côté, d'un bord ou de l'autre des planches. Le plancher s'ouvrirait et son corps serait atrocement déchiqueté.

Ceci elle le savait.

Elle le voyait.

Plus elle restait immobile et comme immobilisée sur les planches, plus ce sort futur devenait une certitude. Elle ne pourrait rester longtemps là.

Une idée atroce vint à l'esprit de monsieur Hitler. 

Son Destin futur - qu'il avait toujours vu héroïque et grandiose - se voyait bloqué par un obstacle nouveau, c'était arrivé tant de fois, et, cette fois, c'était une femme. Il s'était toujours méfié de cette engeance et de leur obsession reproductive. 

Il ne restait qu'à la faire basculer. C'était ce qu'elle craignait. Son inconscient jouait avec elle. Que de choses pourraient penser monsieur Sigismund Schlomo Freud, le célèbre Sigmund Freud , médecin aliéniste, neurologue autrichien, fondateur de la psychanalyse s'il pouvait observer cette scène en ce moment.

Monsieur Hitler alla donc chercher une lance qui lui permettrait de pousser mademoiselle la secrétaire hors de la planche, dans le vide.

Son destin serait cruel.

Mais tel est le sort des grands hommes. Il leur est nécessaire de se servir des petites gens qui sont comme des marche-pieds nécessaires à leur succès.

Ce ne serait pas fait de gaieté de coeur, car monsieur Adolf Hitler n'était pas cruel de nature. 

Mais c'était nécessaire.

Cette pauvre femme terrifiée leur faisait obstacle. 

Monsieur Hitler alla donc chercher la lance. 

Pendant ce temps, monsieur Kafka essayait de l'encourager par des mots aimables, des douceurs et des promesses. Comme on fait d'habitude pour les femmes.

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État 1. 23 nov. 2013