HISTOIRES DE FANTÔMES

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HISTOIRES DE FANTÔMES.

Vers minuit, à la lueur de la chandelle, monsieur Henry Dickson, devant l'âtre où brûle des bûches d'érables et de vieux parchemins, se penche sur son écritoire. Tout est tranquille dans la grande maison, tout semble dormir et, soudain,
il y a ce bruit.

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14.10.12

287. JE SUIS UN ASSASSIN ÉCONOMIQUE

C'était en 2008.

L'État voulait soutenir l'économie mais tous ceux qui pouvaient dépenser le faisaient déjà et tous ceux qui pouvaient emprunter pour dépenser l'avaient fait.

Il fallait maintenir l'ordre des statistiques qui rassuraient le Marché.

Mais on n'avait pas encore pensé aux pauvres.

Les pauvres dépensent moins parce qu'ils sont pauvres. Ils dépensent autant qu'ils peuvent, parfois, tout l'$ qu'ils ont. Ce n'est donc pas un signe de mauvaise volonté.

Ceci n'a rien à voir avec la charité. Ou ce que certains appellent la justice.

Ce n'est pas qu'on veut qu'il y ait moins de pauvres. Ou qu'ils soient moins pauvres. Ou qu'on veuille être taxé encore plus pour les aider.

Qu'ils se débrouillent.

Et s'ils ne peuvent pas qu'ils aillent au Diable.

Tout ceci était normal. C'était ce que le Système voulait.

Mais ceux qui pensaient plus loin voyaient qu'une crise se pointait. L'immobilier allait bien mais que se passerait-il quand ceux qui achètent à gros prix, pensant revendre, ne le pourraient plus? Faute d'acheteur.

Car il faut de l'$ pour acheter une maison.

Nos analystes avaient fait leurs calculs. Avec des graphiques et des statistiques.

Le prix de l'immobilier s'effondrerait. Et les hypothèques si utiles aux banques quand tout va bien risquaient de ne plus être payées si un acheteur s'apercevait, et il y en a qui remarquerait ce détail, que la dette de sa maison valait plus cher que le prix du Marché.

Déjà qu'un acheteur paie sa maisons plusieurs fois avec l'hypothèque; mais il a l'espoir qu'après toutes ces années et décennies de remboursement, la valeur de sa maison égalera presque ce qu'il a dû payer. Et non l'évaluation municipale.

Il fallait de nouveaux acheteurs. Ou être moins exigeant avec eux. Ne pas demander de mise de fond avant de leur prêter.

Mieux, que l'État se porte garant de leurs prêts.

On dit aux politiciens que ce serait une bonne idée. Et eux qui croyaient au Libre Marché et non à l'interventionnisme socialisant des États et qui, au nom de la Liberté Individuelle, n'auraient rien fait pour le pauvre de base, décidèrent d'aider le Marché. Et, accessoirement, le pauvre de base.

Qui devint l'instrument du Marché.

Toutes ces maisons à vendre et toutes celles qu'on construisait.

Et ces condos.

On permit donc à des gens qui n'en avaient pas les moyens d'acheter une maison. Certains dirent que c'était exagérément généreux.

Mais on ne tint pas compte de leur avis.

On s'adressa donc au pauvre de base.

Aucune importance.

La valeur du prêt était basée sur le prix qu'il obtiendrait de la maison à la revente étant donné une augmentation raisonnable de 10% par an. La maison se paierait d'elle-même. c'était tout à fait logique, mathématique, proportionnel.

On lui conseilla même de ne pas acheter une petite maison «selon ses moyens» mais une grosse. La prudence primitive était un manque d'optimisme envers le Système. Une forme de manque de foi.

Être raisonnable, une forme de trahison, d'antipatriotisme.

Car c'est ce que le marché voulait. Et la valeur d'une grosse maison augmentait plus rapidement que celle d'une petite.

Des tas de gens s'achetèrent des maisons ce dont ils n'auraient jamais osé rêver de toute leur vie. La valeur des maisons augmentaient. Et certains vendaient, remboursant leurs prêts, comme le voulait la théorie économique du moment. Pour s'acheter aussitôt une plus grande maison avec une piscine. Ou une plus grande piscine. Une piscine creusée en béton. Calculant déjà ce que cet investissement à effet de levier leur rapporterait. Ils avaient appris de nouveaux mots.

Le pays était rempli de nouveaux capitalistes prêts à mourir pour défendre le système. Et les pauvres devenus bourgeois détestent les pauvres socialistes et communistes qui attendent d'être aidé par l'État.

Qui sont incapables de s'aider eux-mêmes. Des pauvres englués dans la pauvreté et le pessimisme, sans ambition.

Qui votent pour le parti Démocrate.

Nos analystes avaient refait leurs calculs. Avec des graphiques et des statistiques.

Ce mouvement haussier ne pouvait durer indéfiniment. Dès qu'un certain nombre de mauvais emprunteurs ne pourraient plus payer leurs dettes, le Marché ralentirait. Les banques ne perdraient pas tout et récupéreraient la maison et sa valeur et l'$ déjà remboursé par le client. C'est le client qui perdrait tout.

Ce qui est normal.

Par prudence, pour éviter que les banques soient aux prises avec trop de mauvais débiteurs au même moment, on confia le produit aux esprits scientifiques de nos laboratoires financiers.

Il n'y avait pas eu d'innovation depuis des siècles dans le prêt, la dette et le remboursement.

Le prêt est un risque, le prêt est aussi un produit.

On vend ce produit à une personne comme d'autres vendent des matelas et l'acheteur du prêt pour pouvoir profiter maintenant de tout cet $ consent à rembourser par tempérament.

Un prêt personnel pour un matelas ou une hypothèque pour une maison.

Le vocabulaire change tout.

Mais c'est la banque et, bien sûr, accessoirement, le client qui supporte tous les risques. Rien n'avait changé malgré le progrès que toutes les nouvelles théories financières innovatrices et les technologiques informatiques avaient apporté à la finance. Et l'algèbre et les mathématiques supérieures.

On était bien loin de sordides calculs arythmétiques. Des plus et des moins. Des misérables additions et soustractions.

On ne peut comprendre les nouveaux calculs qu'en utilisant la théorie des quantas. Et l'antimatière.

De même que dans la Nature, il y a les lois générales s'appliquant aux objets terrestres et aériens et spatiaux, on a découvert que les mêmes lois ne s'appliquent plus à ce qui est de l'ordre de la particule, de sa substance. Ce qui relève de l'ordre de l'invisible. Qui peut à la fois être et ne pas être, subsister brièvement au même moment, en apparence, se contredire.

Ainsi, l'$ peut être et ne pas être. Se trouver là et, au même moment, loin et ailleurs. Disparaître et répparaître. Changer de sustance, devenir valeur, numéraire, chiffre, particule, onde, vibration, entité et anti-matière.

Il fallait de grands esprits pour concevoir tout ceci.

Il suffisait d'expliquer à ceux qui ne peuvent percevoir tout ceci que c'était le progrès. Que le progrès avait un sens. Une direction. Et ne revenait jamais en arrière.

D'innombrables commentateurs expliquèrent.

De même que l'on construit des collisionneurs afin de fracturer les fines particules, de même des ordinateurs gigantesques faisaient jaillir l'énergie cachée et infinie de l'unité du $.

Et la machine fut constituée d'une infinité de pauvres énergisés par la cupidité et l'ambition.

Tout ceci était possible si on cessait de penser en termes de prêt et de dette. Que l'on changeait les mots. Puisque tout n'est qu'une question de vocabulaire et de signification.

De sens. De direction.

Que l'on appelait ceci produit financier.

Ces simples mots changeaient tout.

Non seulement la réalité de la chose mais ses implications.

L'esprit s'élevait au-dessus de la matière et allait au-delà de la réalité.

Car une fois renommé on pouvait revendre ce produit.

Ce produit était nouveau. Amélioré.

Ce produit avait une valeur.

Ce n'était plus un simple prêt.

Ce n'était plus de la comptabilité de base.

Et n'était pas un simple papier commercial. Mais il était soutenu par des actifs. Nous l'avons répété autant de fois qu'il a fallu.

C'était une nouvelle réalité.

L'énergie dégagée par cette pensée allait produire des ondes jusqu'au fond de la planète.

Des maisons qui prenaient constamment de la valeur.

Voilà ce qu'était cette nouvelle réalité. Et dans cette nouvelle réalité, ne pouvait vivre que des gens nouveaux.

De l'$ produisant sans cesse des intérêts. Des rendements. Des pourcentages.

Nous étions dans une nouvelle économie et il était impossible que le contraire arrive. Ceci aurait été possible dans la vieille économie. Là où vivaient les gens anciens dotés d'un esprit réduit et primaire.

C'était une époque de progrès. Et le progrès va toujours en avant.

C'était hasardeux mais, contrairement à ce que les pessimistes et les prudents pensaient, le nouveau produit trouva des acheteurs. Hors de l'immobilier. Il y a des tas de rentiers et de fonds de pensions qui cherchent à diversifier leurs investissements et leurs risques.

Qui réclament sans cesse des % plus élevés.

Sans compter tous les spéculateurs qui surfent sur la vague immense de l'océan infini du Marché.

Les banques se virent instantanément libérées de leurs dettes. Les spéculateurs voyaient leurs papiers augmenter de valeur car dans un Marché Libre non soumis aux restrictions Étatiques, la valeur augmente sans cesse.

Dans le marché secondaire, les premiers acheteurs des papiers les revendirent. Ils firent du 10%. Plus. 15 %. On parla même de 20. En plus de récupérer leurs mises.

Tout était pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.

Les banques continuaient à prêter à des emprunteurs de plus en plus insolvables. Mêmes des chômeurs. On le répétait: L'état garantissait la valeur des premiers versements hypothécaires. Les premiers versements. Ce qui avait des conséquences prévisibles pour les esprits perspicaces.

Et dès que le délai arriverait à terme, la banque reprendrait la maison et la revendrait plus cher à un nouvel acheteur.

Car tous les acheteurs pauvres et insolvables ne réussiraient probablement pas à rembourser leurs dettes.

Ni à revendre à temps leur maison.

Les laboratoires financiers innovèrent encore.

Les premiers papiers commerciaux avaient une valeur basée sur l'immobilier mais on pouvait aussi y joindre des placements plus obscurs. Et, contrairement, à ce que pensaient les pessimistes, ceci se vendit encore.

On ajouta de l'intelligence au papier.

Dans un Marché Libre, la valeur augmente sans cesse. Et se crée ainsi constamment de la richesse. Et des riches. Le nombre de millionnaires et de milliardaires grandissait sans cesse. Signe d'une économie en santé.

Il fallait s'élever au-dessus de la matière. Investir dans des idées, des rêves et du vocabulaire.

Mais les pessimistes, comme la mère de Napoléon, espéraient que ça dure en priant le veau d'or. Et les plus pessimistes d'entre eux, comme la grand-mère de Napoléon étaient certains que ça ne pouvait durer.

Car il était impossible, selon eux, que la valeur de l'économie monte sans cesse.

On avait beau leur répéter que nous étions dans une nouvelle économie et que les anciens critères de l'ancienne économie basée sur la pierre et le béton étaient dépassés. C'était une économie spiritualisées, philosophiques, intellectualisées.

De la même façon que l'on ne voit pas l'électricité, les ondes électroniques qui transmettent pourtant du son, des images et même de l'$ d'un continent à l'autre.

Ces gens avaient perdu la foi ou n'en avaient jamais eu. C'étaient de mauvais patriotes.

Convenant que les anciens ne pouvaient pas toujours avoir tort, on décida d'assurer un certain nombre de ces prêts et il y avait des institutions spécialisées dans ce domaine risqué.

Et les plus aventureux, certains que tout ce qui monte ne peut grimper indéfiniment, parièrent à la baisse. Il y a des instruments financiers prévus à cet usage.

D'une côté, les banques prêtaient et revendaient sans cesse de nouveaux produits financiers qui étaient regroupés ensuite par d'autres esprits innovateurs qui les revendaient ensuite. Et quand la valeur fut trop grande et pouvait commencer à effrayer les plus ardents, on découpa ces nouveaux produits en plus petits, plus abordables. On leur donna un nom nouveau.

C'était tout ce qu'il fallait: un nom nouveau. Un nouveau mot.

Tout ce temps, les intermédiaires et les gestionnaires, prenaient des primes sur la valeur des transactions.

Je devins ainsi milliardaire.

Et comme j'avais prévu que le Marché s'effondrerait comme autrefois celui des tulipes et que j'avais acheté ces prévisions, je fis mon second milliard lorsque le sol s'effondra sous les pieds des pauvres.

Ces pauvres naïfs qui avaient cru que leurs rêves se réalisaient.

Les banques aussi avaient prévu tous les risques. Que les pauvres ne puissent plus payer. Qu'on saisirait leurs maisons. Qu'on les remettrait en vente. Qu'elles se vendraient. Qu'on ne pourrait peut-être pas payer. Qu'on saisirait encore la même maison pour la remettre aussitôt en vente. Au même prix. Ou plus cher.

Que le cycle continuerait sans fin.

Mais pas que tant d'ignorants ne puissent plus rembourser au même moment.

Incapables de comprendre qu'ils prenaient un risque trop grand pour eux et qu'ils ne pourraient jamais l'assumer.

Incapables de comprendre qu'en cessant de payer au même moment, ils menaçaient la sécurité financière des banques prêteuses.

Incapables de comprendre que toutes ces maisons reprises au même moment feraient s'effondrer le Marché.

Incapables de comprendre qu'en suppliant devant les banques, ils donnaient une image négative du système.

Et dans un système où la pensée positive est de rigueur tout ce qui est négatif est néfaste. La matière et l'anti-matière ne peuvent coexister à la même place au même moment. Il leur faut vivre dans des système parallèles.

On ne voyait plus un graphique ascendant montrant la ligne indiquant la valeur des maisons augmentant sans cesse vers les cieux radieux. Mais on voyait la même ligne descendant sans cesse au fur et à mesure que les faillites augmentaient et augmenteraient. Le Marché ne pouvait absorber à la fois tant de nouvelles maisons.

Les banques avaient prévu tout ceci mais d'une façon confuse. Elles s'étaient débarrassées de leurs prêts en le renommant, éliminant tous les risques possibles. Mais dans leurs autres départements, on continuait à prêter. Prenant chaque fois un risque nouveau. Dans un autre département, on avait conçu, fabriqué et vendu ces papiers et gagné beaucoup d'$. Ce qui allécha un autre de leurs départements qui acheta ces papiers qui, miraculeusement, n'étaient plus soumis à l'attraction terrestre et dont la valeur s'élevait sans cesse vers l'infini. Tel le montrait leurs grilles et leurs graphiques.

Comme les économistes traditionnels le disaient, le Marché s'adapta à une économie de maisons en faillite comme il s'était adapté à une économie d'un immobilier florissant.

La valeur des maisons devint celle que l'acheteur - il y avait encore des acheteurs avec de l'$- voulait bien lui donner. Et ils avaient le choix. Tous ces vendeurs aux abois qui posaient des pancartes devant leurs maisons - malgré que les banques l'interdisaient- pour sauver ce qu'ils pouvaient de leurs économies.

Toutes ces pancartes À Vendre envoyaient un mauvais signal au Marché.

C'était tragique pour les acheteurs mis à la rue. Mais sans importance pour les banques.

Mais ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, vieille formule alchimiste. On la trouve sur la Table d'Émeraude.

Les produits commerciaux et les papiers que l'on se vendait et revendaient ne devaient pas être touchés par la crise immobilière qui ne concernait que les petites gens. Les gens sans importance. La poussière sur les souliers des gens bien.

Mais les esprits innovateurs avaient prédit que leurs prix augmenteraient sans cesse.

Jusqu'à quel niveau? Indéfiniment.

L'infini était la valeur de tout l'$ du monde disponible dont on se servirait pour acheter le dernier papier.

Mais certains investisseurs et spéculateurs s'étaient endettés pour acheter ces papiers. Ils voulaient rembourser leurs dettes pour, probablement s'endetter de nouveau, et investir ailleurs et autrement. Ils mirent en vente leurs papiers.

Mais quelle valeur aurait ces papiers?

Tout le monde était prêt à en acheter: individus, fonds de pension, banques, etc. tant que tout le monde achetait. La courbe était sans fin. Le graphique agressif et vigoureux.

La valeur du papier à vendre fut celle que lui donna l'acheteur qui était prêt à l'acheter. Il ne voyait pas pourquoi il paierait plus cher que celui qui le lui vendait. Et, peut-être, que celui qui le vendait avait absolument besoin de vendre. Qu'il serait compréhensif et souple.

La valeur des papiers se mit à baisser.

On entendit parler de la crise de l'immobilier et on se souvint vaguement qu'une partie de ces papiers ou tous avaient, autrefois, il n'y a pas si longtemps, était adossés à ce marché terriblement physique.

On parlait maintenant de la crise du papier.

Beaucoup de gens se mirent à vendre et un certain nombre réussirent et devinrent riches.

Certains réussirent à vendre et tout en demeurant riches le furent un peu moins.

Les imitateurs qui s'y prirent trop tard n'eurent pas cette chance.

Il y a le premier et tous les autres sont des derniers.

Il y eut la panique.

La plupart des gens se mirent à vendre et ceux qui ne vendirent rien ou n'essayèrent rien étaient ceux qui n'étaient au courant de rien. Car toutes les banques qui avaient spéculés sur ces papiers, les avaient refilés à leurs clients, rentiers, sous forme d'investissement.

De la même façon que dans un Marché en santé et haussier les prix montent sans cesse. Dans un Marché baissier et malade, les prix baissent et baissent.

Jusqu'à quel niveau?

Zéro.

Les banques qui avaient acheté et continué à acheter ces titres et n'avaient pas eu le temps de les refiler à leurs bons clients voulant des investissements dynamiques et des rendements à 2 chiffres, avaient pour des milliards de ces papiers dans leurs ordinateurs. Le mot «papier» n'est qu'une manière de matérialiser, de visualiser ce qui n'est qu'une absraction, une essence subtile.

Plusieurs fois la valeur de la production réelle de l'économie physique (industrie, machines, objets) étaient utilisées dans ces papiers dont la valeur était zéro.

Zéro.

Comme si la vie économique n'avait plus aucun sens.

Les banques avaient empruntés et s'étaient prêtées les unes aux autres pour spéculer.

On pouvait dire que c'était de l'$ imaginaire. Puisqu'on ne vit jamais un billet. Et que le produit était tout autant imaginaire puisqu'il n'était que des chiffres et des courbes et des électrons et une quantité de mémoire dans des ordinateurs gigantesques.

Ondes et particules.

Rides dans l'eau.

Vibration.

Poésie.

Il n'y a que les petits investisseurs et pensionnés des banques qui virent dans leurs relevés de placement des mots étranges. On avait utilisé une grande partie de leur dépôt et la moitié ou la totalité de leur $ était disparu.

Les banques étaient ruinées.

Des pays entiers étaient ruinés.

Et des millions de travailleurs et de pensionnés.

L'économie s'arrêta.

Il y eut des millions de chômeurs qui continuèrent à respirer.

Les usines qui ne pouvaient plus fabriquer faute d'acheteurs pour leurs produits ou de vendeurs de pièces et de matières premières. Et parce que les banques refusaient de leur prêter l'$ nécessaire.

Et les acheteurs qui ne demandaient qu'à acheter et emprunter ne le pouvait plus.

Des fonds de pensions avaient engloutis des milliards dans ces nouveaux théorèmes. Et rien n'en était ressorti. Des pensionnés ne pouvaient plus recevoir leurs rentes.

Il y eut d'innombrables suicides et autant de meurtres.

La peur rendait fou.

Tout ceci ne m'intéressait pas à ce moment. De toute façon dans une période de crise, c'est celui qui a encore de l'$ ou de l'or qui peut acheter ce qu'il veut.

Il y avait tant de gens en faillite.

Tant de gens prêts à vendre tout ce qu'ils avaient pour le peu qu'on voudrait bien leur donner.

Tant de gens qui n'avaient pas le choix.

Sauf celui de dormir dans leurs autos.

J'achetai d'immenses territoires et on fut content de ce que je voulais bien donner.

Je matérialisai ainsi les données financières en ma possession sous forme de terres agricoles et foncières avant que les subtiles ondes mathématiques en ma possession ne s'évaporent.

Des esprits innovateurs et supérieurs comme le mien firent ainsi.

Nous étions les maîtres du Monde. Nous possédions le futur.

Je me remariai. Je trouvais que mon ancienne épouse avait vieilli. Trop de soucis. Tout ceci endommage les femmes. Ma nouvelle femme était plus jeune. Une nouvelle vie commençait pour moi.

Jusqu'à ce qu'une bombe explose dans mon bureau.

C'était hier. Je crois, le 13 octobre.

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14.15. 26 octobre 2012. État 3