HISTOIRES DE FANTÔMES

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HISTOIRES DE FANTÔMES.

Vers minuit, à la lueur de la chandelle, monsieur Henry Dickson, devant l'âtre où brûle des bûches d'érables et de vieux parchemins, se penche sur son écritoire. Tout est tranquille dans la grande maison, tout semble dormir et, soudain,
il y a ce bruit.

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15.9.12

238. IL Y A D'AUTRES SENS QUE LA VUE QUI NE MONTRE PAS TOUT. LE PAYSAGE QUE L'ON VOIT N'A PAS LA MÊME FORME ET LA MÊME ÉTENDUE QUE L'ESPACE ILLUSTRÉ QUE L'ON ENTEND OU QUE L'ON SENT.

Henry Dickson respirait l'air et ses parfums et pensait encore que même sans ouvrir la moindre des caisses, on savait déjà ce qu'elles pouvaient contenir. En ouvrant le plancher, il avait senti cette odeur improbable si finemement diluée mais confinée dans le temps et l'espace, toujours présente sous forme de trace.

En descendant l'échelle, on devinait davantage.

Mais en faisant craquer le couvercle et son sceau de poussière, même avant de voir, tout un univers scientifique, technologique si présent et odorant se manifestait. Avant même de voir.

Comme pour un parfum. Des notes de têtes, de coeur et de fond.

Comme pour une partition musicale mais avec des notes olfactives au lieu des sons venus d'instruments simples ou complexes maniées maladroitement ou avec une suprême habileté, résultat de décennies de pratiques journalières et de nombreuses heures dans ces journées.
La pièce secrète avait sa forme définitive. Son contenu imprégnait son espace, le transformait. Au lieu du sol de terre et des murs de pierres et du plafond de poutres de bois, un autre paysage théorique se superposait, l'influencait, se structurait aussi bien visuellement que par l'odeur et les effluves.

Des notes fugaces et volatiles. Les notes de tête, le parfum de tête, tel que ressenti lors de l'enlèvement de la première planche du plancher. Toutes ces nuances complexes et éphémères. Et qui irradait lors de l'ouverture définitive de la trappe. L'esprit des lieux enfermé depuis des générations manifestait sa présence.

Évanescent.

Les notes de coeur plus durable. La personnalité des lieux.

Et les notes de fond, les plus lourdes. Souterrain, terre, pierre, froid, le froid à une odeur, tenace, s'évaporent lentement, qui s'accrochent à vous et vous suivent et font que d'autres personnes qui n'ont pas été là où vous êtes allés devinent d'où vous venez. Des notes boisées. Et les huiles fines et poivrées. Le sillage du parfum. Les traces du secret.

Qui peut durer plusieurs jours. Qui vous possède et vous envahit. Mêlé à votre peau et à vos cheveux. Lourde. Insistante. Tenace. Entêtant. Les nageuses sentent définitivement le chlore quoiqu'elles fassent pour enlever l'odeur qu'elles ne sentent plus de toute façon.

L'esprit des lieux exhalait l'odeur de la science de la mort la plus précise et la plus exquise.

Et ce qu'on y découvrit est ceci:

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15 sept. 2012. État 1